Résilier un marché pour ne pas avoir à trop emprunter

Faute d’avoir obtenu les subventions espérés, une personne publique peut résilier un marché afin d’éviter d’avoir trop à emprunter, a admis récemment une cour administrative d’appel.

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Après avoir lancé un MAPA de travaux, une commune décide finalement de résilier, pour un motif d’intérêt général, la totalité des lots. Elle n’a pas obtenu l’intégralité des subventions espérées et ne veut pas trop emprunter, comme lui a conseillé la préfecture.

Un des titulaires lui demande alors la somme de 28 703 euros HT au décompte de résiliation de son marché, avec mise en demeure de lui notifier ledit décompte de résiliation. Par un avenant, l’acheteur confirme la résiliation du lot, en lui versant une indemnité de 7973 euros. L’entreprise met de nouveau en demeure la collectivité de lui notifier le décompte de résiliation de son marché. Puis demande au TA de condamner la personne publique au règlement du reliquat, soit 20 729 euros HT.

Comme le tribunal administratif n’accède pas à cette requête, l’affaire se poursuit devant la CAA. Pour le fournisseur, le motif d’intérêt général n’est pas fondé :   les services de l’État n’ont pas recommandé à la commune d’exclure tout recours à l’emprunt pour financer ses projets d’investissement mais d’y recourir raisonnablement en privilégiant les investissements bénéficiant de subventions, ce qui correspondait au projet concerné. Dès lors, l’entreprise considère qu’elle a droit à être indemnisée de l’intégralité de son préjudice, comportant l’indemnisation du manque à gagner correspondant à la marge nette sur laquelle elle aurait pu compter si elle avait pu exécuter le marché.

Les magistrats notent d’abord que la dégradation de la situation financière de la personne publique avait amené la préfecture à lui demander de prendre d’urgence des mesures, d’emprunter de manière prudente afin de financer des projets que la collectivité pourrait supporter.

Montant de l’emprunt doublé

Dans le cas présent, le marché était censé être financé quasiment aux deux tiers grâce à des subventions. Les aides demandées n’avaient pas été accordées à la hauteur des espérances. Ce qui obligeait la collectivité à quasiment doubler le montant de son emprunt.

Dans ces conditions, « les contraintes budgétaires ayant conduit à l’abandon du projet (…) constituent un motif d’intérêt général de nature à justifier, à lui seul, la résiliation unilatérale du marché en litige », estime la CAA.

S’agissant de l’indemnité réclamée par le prestataire, « dès lors que l’étendue et les modalités d’indemnisation en cas de résiliation pour motif d’intérêt général du marché avaient été prévues par l’article 46.4 du cahier des clauses administratives générales applicable aux marchés publics de travaux, qui s’applique au marché en cause, la société appelante n’était pas en droit de prétendre à une indemnité au titre de son manque à gagner. » La requête est donc rejetée.

Référence : CAA de Toulouse, 17 octobre 2023, n°21TL23381

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