La santé d’un individu est impactée par de nombreux facteurs. La fondation américaine Robert Wood Johnson a démontré que seuls 20 % de celle-ci sont directement liés aux soins médicaux. Les facteurs socio-économiques (40 %), l’environnement physique (10 %) et les comportements individuels (alimentation, tabagisme, consommation d’alcool, pratiques sexuelles…) représentent les 80 % restants.
Financement lié aux déterminants sociaux de la santé
Ces déterminants sociaux de la santé transforment des problèmes de santé « simples » en pathologies coûteuses pour le patient et le système de santé. Les nouveaux modes de financement pratiqués aux Etats-Unis amènent les offreurs de soins à prendre en considération le patient dans sa globalité et à rechercher des moyens de répondre à l’ensemble de ses besoins, y compris en termes de logement ou d’alimentation.
Ainsi, le financement au parcours de soins du diabète prévoit un forfait global pour tous les soins du patient. Si ce dernier n’a pas accès à des produits frais et continue à manger des produits surgelés ou du « fast food », son état de santé (et donc le coût de ses soins) augmente et risque de dépasser le forfait. Il en va de même pour un patient asthmatique vivant dans un logement insalubre.
Certains groupes de santé précurseurs commencent à investir dans la prévention en lien avec les déterminants sociaux de la santé, principalement à l’aide de fonds caritatifs ou publics. Cela passe par exemple par la création d’une offre de logement à prix modéré ou l’ouverture de supermarchés hospitaliers.
UH « Food for life », un modèle de pharmacie alimentaire
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Les hôpitaux universitaires de Cleveland (UHC), en partenariat avec Sodexo et une banque alimentaire locale, ont décidé de s’attaquer à l’insécurité alimentaire en ouvrant plusieurs supermarchés hospitaliers ou pharmacies alimentaires. Les médecins et soignants de ses 23 hôpitaux et de ses 50 centres de soins primaires ont la possibilité de prescrire un accès à la pharmacie alimentaire à leurs patients qui sont identifiés comme étant en situation d’insécurité alimentaire.
Ceux qui répondent aux critères d’accompagnement reçoivent gratuitement une semaine d’aliments sains pour eux et leur famille. Ils peuvent revenir se fournir pendant une période de 6 mois renouvelable. Les patients qui se rendent au supermarché hospitalier bénéficient d’une consultation individuelle avec un diététicien, rémunéré par Sodexo, qui les conseille pendant leurs courses. Ils ont le choix parmi une variété d’aliments à haute valeur nutritive : céréales complètes, produits laitiers, produits frais, fruits et légumes, viande… L’équipe de la pharmacie alimentaire a aussi une action éducative. Elle partage des recettes de cuisine saines, des conseils de préparation des repas, démonstrations à la clef (sur place mais aussi en ligne).
Une innovation médicale qui fait ses preuves
« Les supermarchés hospitaliers ciblent le lien qui existe entre la nourriture et la santé » explique Anne Leach, directrice de la nutrition clinique et communautaire. « Les hôpitaux universitaires de Cleveland ont créé ce dispositif de prévention pour lutter contre l’insécurité alimentaire, qui peut avoir des conséquences négatives sur la santé si elle est prolongée ou répétée. C’est un vrai programme médical qui s’adresse en priorité aux patients diabétiques, hypertendus et insuffisants cardiaques. Nos diététiciens prennent le temps de faire l’anamnèse alimentaire des patients, d’expliquer l’impact de l’alimentation sur leur diagnostic et de les accompagner vers une alimentation plus saine en les guidant concrètement dans leurs décisions d’achat. »
Une étude est en cours pour évaluer l’impact du programme sur les patients, en particulier sur leur consommation médicamenteuse et sur leurs séjours hospitaliers. En effet, un nombre important de patients à la limite du diabète avaient le choix entre un traitement médicament et l’orientation vers la pharmacie alimentaire pour apprendre à bien manger et à contrôler leur glycémie.
84 tonnes de nourriture en 4 ans
Ces pharmacies alimentaires ont été installées sur les sites du CHU situés dans des zones de désert alimentaire, où l’accès à des denrées de qualité est très complexe et se dégrade. En 2019, le taux d’insécurité alimentaire du comté de Cuyahoga, l’un des plus peuplés de l’Ohio, était de 13,9 %. Un an plus tard, il atteignait 18,35 %, soit une augmentation de 31 % due à la pandémie. UHC a ouvert quatre pharmacies alimentaires dans le nord-est de l’Ohio.
Entre 2018 et 2022, les supermarchés hospitaliers ont fourni un total de 84 tonnes de nourriture à 11 200 patients et membres de leur famille. Ce programme touche donc les malades mais aussi les enfants et petits-enfants qui peuvent vivre avec eux. De projet pilote, UH Food for life est rapidement devenu l’un des projets phares des hôpitaux universitaires de Cleveland.
