Le CH Princesse Grace révolutionne sa pose de chambre implantable

Le Centre hospitalier Princesse Grace à Monaco a totalement revu sa manière de poser les chambres implantables pour en faire un geste écoresponsable. Le nouveau protocole permet de diminuer la quantité de médicaments, d’énergie, de bras, d’impact environnemental… Mais aussi les coûts.

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Terminée la pose des chambres implantables réalisée par les chirurgiens au Centre hospitalier Princesse Grace à Monaco. Ces petits boitiers reliés à un cathéter et placés sous la peau (le plus souvent utilisés pour une chimiothérapie) sont désormais installés par les anesthésistes. Pourquoi ce changement ? Tout est parti d’un besoin de réorganisation des blocs dans la foulée de la crise du Covid-19.

À ce moment-là, Laure Bonnet, médecin anesthésiste réanimateur de l’établissement et membre du comité développement durable de la Société française d’anesthésie et de réanimation (Sfar) estime que le process, réalisé par les chirurgiens, pourrait être optimisé. « Leur technique est plus longue que celle des anesthésistes, plus invasive avec sédation systématique », analyse celle qui a fait son clinicat à Gustave Roussy et commencé sa carrière à l’Institut Curie, deux établissements où ce geste est réalisé par les anesthésistes.

Ni sédation, ni DASRI

Nommée référente de la pose de chambres implantables par les médecins anesthésistes, Laure Bonnet, qui en parallèle passait alors le DU de développement durable en Santé à Sorbonne Université, choisit de faire de ces actes une activité écoconçue. Exit la sédation, le patient se détend via une hypnose conversationnelle, auxquels des soignants étaient déjà formés.

Laure Bonnet © N.Kalogeropoulos

Quant au matériel retenu, il permet des gains environnementaux considérables. Ainsi quand les chirurgiens utilisent une boite de 34 instruments, il n’en faut que sept pour les anesthésistes. « Or une fois la boite ouverte, il faut tout stériliser derrière ! », souligne Laure Bonnet, qui a évalué l’impact des dispositifs médicaux (DM) pour les lister « au plus proche des besoins » et au regard d’une analyse du cycle de vie simplifiée, menée grâce au logiciel Ecolizer 2.0 (alors gratuit). En termes de cycle de vie, le nouveau protocole « est 5,5 fois moins impactant », a calculé Laure Bonnet.

Autre effet environnemental positif, il génère deux fois moins de déchets que le précédent et aucun DASRI. De même, la consommation électrique est divisée par 3,4, grâce à l’absence de recours à des seringues électrique utilisées habituellement pour la sédation, et à l’utilisation d’un échographe, déjà dans le service et dont la consommation électrique est moindre.

Soignants et patients convaincus

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L’analyse de l’enquête de satisfaction montre combien le nouveau protocole est accepté. « Comme ils ne sont pas endormis, les patients n’ont plus besoin de venir à jeun, d’être perfusés, ils viennent à pied accompagnés d’un brancardier, dans le cadre d’une procédure ‘patient debout’. Résultat, la satisfaction globale est à 9,5/10, l’hypnose à 9,9, le patient debout à 9,7… », se réjouit-elle. De plus, le score d’anxiété s’effondre entre le début et la fin de l’opération. « Cela signifie qu’on a réussi à maintenir un climat de confiance », analyse Laure Bonnet.

Les soignants ne sont pas en reste. 83 % d’entre eux considèrent que la relation avec leur patient pour cette nouvelle prise en charge est améliorée (93 % des patients le pensent aussi). Plus de 2 sur trois (69 %) déclarent même que ce genre de soin leur permet de retrouver du sens dans leur travail, et la moitié que leur qualité de vie au travail est meilleure.

Poses programmées sur un seul jour

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Il faut dire aussi que le nouveau process a des impacts positifs sur l’organisation au sens large. Désormais, les poses sont programmées sur un seul jour par semaine, et non plus au gré des places trouvées dans le planning. Supprimer la sédation désencombre la salle de réveil et la charge de travail induite, accélère le turn-over en ambulatoire. « Après la collation, les patients, non sédatés, peuvent partir quand ils veulent et ne sont pas obligés d’attendre un certain temps », remarque Laure Bonnet.

C’est particulièrement important pour des personnes amenées à souvent revenir à l’hôpital et plutôt enclines à avoir envie d’en repartir vite. Autre gain organisationnel, la sédation évite des consultations avec un anesthésiste, ce qui libère un créneau pour une autre personne, et un déplacement pour le patient.

25 % de DM en moins

Sans sédation, le nombre de médicaments nécessaire diminue. Donc la note aussi ! Idem avec moins de dispositifs médicaux. « Pour les DM, c’est 25 % d’économie (entre les deux protocoles) », a calculé Laure Bonnet, dont la nouvelle organisation, soutenue par la direction, a toutefois nécessité l’ajout d’un mi-temps d’anesthésiste supplémentaire.

« Quant à la durée moyenne d’une pose, elle est divisée par deux (c’est du temps de bloc gagné, NDR). Et elle nécessite moins de personnel : un chirurgien a besoin d’un aide opératoire, d’une infirmière circulante, d’un médecin anesthésiste et d’un infirmier anesthésiste quand un médecin anesthésiste a seulement besoin d’un infirmier anesthésiste et d’un aide-soignant. La masse salariale est divisée par trois et demi  ». Ce sont autant de bras disponibles ailleurs dans un contexte de recrutement compliqué.

Quant à la stérilisation, avec 27 instruments en moins, son coût est 3,5 fois moindre. Outre cette donnée (qui varie selon le matériel utilisé pour stériliser, son temps d’amortissement, et quantité d’autres paramètres), les gains obtenus grâce à la pose de chambres implantables ainsi écoconçue sont valables pour tout établissement. « La démonstration est chiffrée. On peut faire moins impactant sur le plan environnemental, plus économique tout en maintenant la qualité des soins, voire en l’améliorant puisque les patients trouvent que c’est mieux », conclut la médecin qui réfléchit déjà à optimiser par exemple du recours de l’oxygénothérapie.

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