Table magique : des résultats réels

Lancée en 2015 aux Pays-Bas, la « table magique » fait peu à peu son entrée dans les établissements français. Objectif : stimuler autrement les résidents atteints de troubles cognitifs. Et sans être aussi enchanteurs que le nom pourrait le laisser penser, ses effets s’avèrent réellement probants.

Conçue par l’ingénieure Hester Le Riche, la Tovertafel © (table magique en français) est un dispositif technologique capable de transformer la table la plus banale en outil thérapeutique innovant. Fixé au plafond, un vidéoprojecteur de haute qualité diffuse des images mobiles sur le plan placé à son aplomb, images avec lesquelles les résidents peuvent interagir grâce à des capteurs infrarouges qui répondent aux mouvements de leurs mains et bras.

Des haut-parleurs complètent l’expérience immersive. Le pari du dispositif tient en quelques mots : briser la chape qui entoure les personnes âgées souffrant de maladies neurovégétatives en passant par les sensations et la réminiscence pour les inciter à réagir, physiquement et socialement.

Des effets immédiats

Et la gageure semble réussie. Sur les 6 000 tables magiques commercialisées depuis six ans, aux Pays-Bas bien sûr, mais aussi en Suède, en Allemagne ou même en Australie, 700 l’ont été au profit d’établissements français. Parmi ceux-là, l’Ehpad Saint-Vincent situé à Valserhône (Ain), a, grâce au Lyon’s Club, bénéficié de la solution dès 2019, suivi quelques mois plus tard par le deuxième établissement de l’association, l’Ehpad Sœur Rosalie implanté à Confort.

Directrice des deux structures, Jacqueline Puthet avait été conviée à une « démo » dont elle était sortie « conquise par la portée de ce nouvel outil, immédiatement visible sur des personnes coupées du monde extérieur et qui, soudainement, entraient en mouvement. » Même constat à l’Ehpad Paradis à Espaly-Saint-Marcel (Haute-Loire) : « Depuis le printemps dernier, la table y est installée dans le service Cantou où elle déclenche des réactions que la seule médiation humaine ou les activités classiques ne suscitent plus », rapporte l’éducateur spécialisé, Nicolas Joubert.

L’apathie diminue, le regard s’éclaire, la main suit l’image, un sourire parfois se dessine… À la faveur d’un renvoi de ballon par exemple, une interaction peut même s’engager avec les autres résidents de la table. Certains vont jusqu’à verbaliser leur intérêt. Bref, « cette thérapie alternative n’a pas seulement des effets au plan cognitif ou émotionnel ; elle agit aussi au plan physique et social », résume Nicolas Joubert. « Sans compter les familles qui retrouvent pour un instant la joie de « faire avec » leur parent », complète Jacqueline Puthet.

Pas de miracle pour autant

Ballon à se relancer, feuilles mortes à rassembler ou à éparpiller, notes de musique à presser… Stimulants ou apaisants mais tous très intuitifs, les 29 jeux inclus à la nouvelle version du dispositif conviennent à divers stades de la démence et à différents moments. « Les résultats sont vraiment notables sur des résidents très apathiques ou déambulants, des personnes dont le MMS est inférieur à 15 (Mini Mental State, évaluation de la maladie d’Alzheimer sur 30 points, plus le score est bas, plus la démence est sévère. NDR) », confirme Jacqueline Puthet.

Mais même si elle est principalement dédiée aux unités protégées, la table magique trouve aussi sa place dans les étages classiques, utilisée notamment avec le même succès auprès des résidents souffrant de troubles mnésiques sans troubles comportementaux. Pour autant, les deux professionnels sont catégoriques : inutile d’attendre des performances, elle « participe d’un maintien des acquis mais ne génère pas de progrès sur le long terme », pose le professionnel de l’Ehpad Paradis.

Un coût significatif

Facile à manier – les deux heures de formation dispensées lors de la livraison suffisent à en assimiler le fonctionnement, « la table magique s’utilise rapidement et sans contrainte, sauf à vouloir déplacer régulièrement le vidéoprojecteur, vendu avec quatre supports différents », modère Nicolas Joubert.

Autre bémol et non des moindres : le coût du dispositif, aux alentours de 9 500 euros TTC pour la version lancée depuis janvier (vidéoprojecteur avec ses 29 jeux, installation, formation et SAV durant deux ans dont mise à jour des jeux)… « Une somme délicate à réunir sans aides, les investissements propres étant fléchés vers d’autres priorités », expose Jacqueline Puthet.

En Haute-Loire, Nicolas Joubert confirme, l’acquisition n’ayant pu se faire ici qu’avec l’appui des Hôpitaux de Paris intervenus pour 75 % du budget. Toutefois, une offre en leasing est désormais possible, proposée sur 24 ou 36 mois et portant dès lors la dépense aux charges et non aux investissements. Pour un appui aussi performant au travail et à l’engagement des soignants, une formule qui serait presque… magique.

 

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