Les exosquelettes, outil incontournable du logisticien de demain ?

95 % des maladies professionnelles reconnues dans le secteur du transport et de la logistique sont liées à des troubles musculosquelettiques (TMS). Les exosquelettes sont-ils une solution prometteuse à ce problème ? C’est la question qu’étudie une équipe de chercheurs spécialisés en logistique au Fraunhofer Institute en Allemagne.

© Fraunhofer IML – Michael Neuhaus

Selon Semhar Kinne, chercheuse à l’Institut Fraunhofer de Dortmund, ce sont surtout les activités telles que la préparation manuelle des commandes et la palettisation qui présentent un risque élevé de TMS dans le secteur de la logistique. En effet, ces activités se caractérisent par des manipulations manuelles répétitives de charges, des postures contraignantes et des mouvements fréquents de levage et d’abaissement. Contrairement à l’industrie manufacturière, le secteur de la logistique se caractérise par la manutention d’un spectre d’articles très hétéroclites, qui dont le poids, la taille, la stabilité, le centre de gravité, etc. varient.

© Fraunhofer IML – Michael Neuhaus

Cette hétérogénéité complique l’automatisation fiable et économique des processus de manipulation. Il revient donc aux logisticiens de manipuler ces articles, avec un impact sur leur santé qui se traduit par d’importants TMS. Lors d’une étude sur site, il a été calculé qu’en moyenne 100 colis étaient palettisés par heure et par poste de travail, avec un poids moyen de colis oscillant de 8 à 9 kg. Dans le contexte des difficultés de recrutement qu’on connait aujourd’hui, l’importance des mesures préventives pour favoriser le maintien de la capacité de travail ne cesse de croître.

Soulager certaines parties du corps

Les exosquelettes sont une solution qui se généralise aujourd’hui après des années d’expérimentation. En France, plusieurs blanchisseries hospitalières ou inter-hospitalières se sont équipées. La BIH de Saintonge a choisi cette solution afin de faciliter la manutention et l’accrochage des sacs de linge sale (lire notre article du 15 novembre 2021). Celle de Saint-Germain-en-Laye pour inciter les agents à adopter une meilleure posture (lire notre article du 2 novembre 2022). La blanchisserie de Périgueux  pour le tri du linge sale (lire notre article du 11 avril 2023).

Ces structures externes sont portées par-dessus les vêtements pour soutenir des parties spécifiques du corps de manière active ou passive. La principale contrainte dans les activités logistiques est causée par le hissage et le transport. Le bas du dos est particulièrement sollicité. Les exosquelettes viennent donc soutenir cette zone précise.

Dans les cas où des activités au-dessus du niveau de l’épaule sont également effectuées, comme lors du chargement et du déchargement de conteneurs ou de la cueillette sur des étagères hautes, il y a un stress accru dans la région de l’épaule et du cou. Des exosquelettes sont disponibles pour compenser le poids sur les bras. Il en existe également pour soulager les genoux lors d’activités accroupies ou d’autres parties spécifiques du corps, mais ils ne sont pas encore largement utilisés dans la logistique.

Exosquelettes passifs et actifs

Les exosquelettes actifs détectent les mouvements des utilisateurs à l’aide de capteurs et les utilisent pour déclencher des mouvements de soutien électriques ou pneumatiques. Les exosquelettes passifs ont un effet purement mécanique et sont donc beaucoup plus faciles à transporter (en termes de poids). Ils disposent généralement de ressorts à gaz ou d’élastomères qui absorbent l’énergie lors de certains mouvements et la redonnent à l’utilisateur pendant le contre-mouvement. Il existe également des systèmes qui sont basés sur des textiles et qui n’ont que quelques structures rigides. Un site recense toutes les machines sur le marché.

© Fraunhofer IML – Michael Neuhaus

Pour Semhar Kinne, tous les systèmes ont leurs avantages et leurs inconvénients, qui doivent être évalués sur le lieu de travail du professionnel dans le cadre d’une analyse ergonomique de l’activité. En effet, toutes les autres options techniques et organisationnelles pour améliorer l’ergonomie sur le lieu de travail doivent être épuisées avant d’envisager le recours à un exosquelette. La chercheuse allemande recommande d’impliquer individuellement les employés dans le choix du bon exosquelette pour augmenter l’acceptation du dispositif et trouver le bon système dans l’offre disponible.

Réduire la fatigue

« L’activité professionnelle n’est pas affectée par l’utilisation d’exosquelettes. Il n’est pas non plus prévu que les gens travaillent davantage quand ils portent un exosquelette. Il s’agit purement d’un système d’assistance qui rend certaines séquences de mouvements moins stressantes. Cela peut, par exemple, avoir pour effet de réduire la fatigue », expose Semhar Kinne, « certains exosquelettes sont également conçus pour favoriser des mouvements et des postures ergonomiques et ainsi avoir un effet préventif contre les TMS ».

Toutefois, l’impact de ces équipements, en particulier à long terme,  n’a pas encore été démontré scientifiquement, surtout sur les postes de travail mobiles tels que la préparation de commandes, observent les chercheurs du Fraunhofer Institute. En effet, les conditions de travail ne peuvent pas toujours être ergonomiques, par exemple pour collecter un article sur une étagère basse ou lorsque les articles sont stockés sur une palette.

Lien vers le centre de recherche sur les exosquelettes du Fraunhofer Institute

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