Demande de modification d’une offre évincée

Sollicité après l’attribution d’un marché pour réajuster son offre, un soumissionnaire évincé n’a pas réussi à convaincre le tribunal administratif que le procédé l’avait empêché de contester la procédure. Cependant il a obtenu le remboursement des frais engagés pour rectifier sa proposition initiale.

© Epictura

Classée deuxième d’un appel d’offres ouvert, une entreprise déclenche un contentieux. Elle a été informée le 17 août 2021 du rejet de son offre. Mais le 30 du même mois, un agent du pouvoir adjudicateur lui a transmis un mél, sans passer par le profil acheteur, en l’avertissant « des améliorations qui seraient souhaitables », en lui laissant un délai de quatre jours pour répondre, tout en lui précisant qu’une visite du site était possible ! Le fournisseur amende son offre et la retourne au donneur d’ordre le 2 septembre. Sans que cela ne change quoi que ce soit à l’issue du marché, comme on pouvait s’y attendre.

Le prestataire estime donc que le pouvoir adjudicateur a commis une faute en engageant irrégulièrement une négociation postérieure à l’attribution.  Et il considère que l’acheteur lui a formulé une promesse finalement non tenue, puisque son offre n’a finalement pas été sélectionnée. Il réclame donc à la personne publique une somme de plus de 56 000 euros pour le manque à gagner et 2500 euros au titre des frais engagés pour l’offre remaniée.

Le tribunal administratif constate que la collectivité, par l’intermédiaire de l’un de ses agents, a bien demandé à l’entreprise de modifier son offre. Cependant, note-t-il, « aucune suite n’a été donnée à ce courriel » alors que la société a été informée, le 17 août 2021, du rejet de son offre en même temps que le nom de l’attributaire et les notes obtenues. « Dans ces conditions, « le courriel en litige, survenu à l’issue de la procédure d’attribution du marché » ne constitue pas à son sens « l’ouverture d’une phase de négociation avec les candidats à cette attribution. » Une analyse qui fera certainement débat chez les juristes spécialistes de la commande publique.

Pas de négociation irrégulière mais remboursement des frais engagés…

« À supposer même que ce courriel soit regardé comme ouvrant une phase de négociation », les juges estiment de toute façon que « la seule irrégularité de cette négociation est sans lien avec l’éviction » de la société requérante, laquelle « résulte exclusivement de l’analyse des offres du 12 août 2021 conduisant au rejet de son offre, notifié par courrier du 17 août 2021. »

Pour le TA, ce message qui ne comporte pas d’appréciation négative sur l’offre de la société attributaire, et ne fait pas état d’une réévaluation des offres,  ne constitue pas une promesse de la personne publique d’attribuer à la société requérante le marché en litige.

Cependant, les magistrats admettent que le courriel a « pu instiller un doute auprès de la requérante sur le caractère définitif du rejet de son offre, jusqu’à ce que celle-ci reçoive, par courrier postérieur du 8 septembre 2021, la confirmation que le marché en litige a été signé avec la société retenue à l’issue de l’analyse des offres faite le 12 août 2021. »

Ils jugent donc qu’il y a lieu pour la personne publique de régler les dépenses engagées par la société pour modifier son offre (2500 euros) correspondant aux frais de rémunération de son personnel, lesquels « n’apparaissent pas disproportionnés en l’espèce ».

Référence : Tribunal administratif de Montpellier, 15 juin 2023, n°2106216

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