Les achats, vecteur de lutte contre les TMS

La majeure partie des maladies professionnelles reconnues dans le secteur de la santé est liée aux troubles musculosquelettiques (TMS). Activés dans le cadre d’une démarche globale de prévention, les achats d’équipements et de mobiliers adaptés peuvent contribuer à réduire ce fléau. L’investissement consenti en faveur de la QVT est économiquement viable si l’on prend en compte l’ensemble des coûts, ont assuré les professionnels invités à un webinaire initié sur le sujet par le Resah à l’occasion de la Semaine du développement durable.

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Selon les données de l’Assurance maladie, 95 % des maladies professionnelles reconnues dans les secteurs sanitaire et médico-social sont reliées à des troubles musculosquelettiques (TMS). Soit plus de 2,3 millions de jours de travail perdus pour les salariés touchés. En EHPAD, les TMS représentent un coût de 46 millions d’euros par an. Et les maux de dos sont à l’origine d’un quart des accidents du travail.

Les TMS ne sont pas une fatalité

Des chiffres qui montrent l’ampleur du phénomène. Pourtant « il n’y a pas de fatalité », a assuré Jean-Philippe Sabathé, ergonome et responsable de la prévention des risques professionnels au groupe hospitalier Paris Saint-Joseph, durant le webinaire le 6 octobre dernier. « On peut tordre le cou aux TMS, amener du bien-être pour les résidents et de la qualité de vie au travail ». En démarrant une démarche globale de prévention, avec le soutien de la direction générale qui doit montrer qu’elle a la volonté d’investir dans ce champ. « C’est un élément clef », a-t-il insisté.

La formation, le changement de pratiques professionnelles sont indispensables. Mais les achats ont aussi leur carte à jouer. Les établissements ont tendance à privilégier des meubles solides et durables, donc lourds, souvent à l’origine de TMS. « Le mobilier est un outil de travail dans les EHPAD pour le personnel, un objet de vie pour les résidents. Il ne peut pas être celui que l’on trouve partout. Il faut le travailler différemment », a argué Laetitia Giubbi, de l’entreprise DLM Créations, fabricant nîmois spécialiste des ESMS depuis 25 ans, qui a, par exemple, mis au point un système de patins permettant de déplacer les équipements sans efforts.

« Il faut aller plus loin, faire qu’un fauteuil contribue à faciliter le déplacement d’un résident, lui redonne de l’autonomie, qu’il puisse faire seul », a renchéri Jean-Philippe Sabathé. De quoi également limiter le port de charge pour les équipes soignantes. Encore faut-il éviter qu’un matériel étiqueté plus ergonomique finisse inutilisé dans un coin. Il doit donc coller aux besoins. « L’établissement doit connaître les points de rupture, l’origine des arrêts de travail », a insisté Laetitia Giubbi. Son leitmotiv : « écouter le terrain ». « Il faut partir du besoin réel. Les solutions ne sont pas transférables d’un établissement à un autre », a-t-elle prévenu.

Le coût du temps masqué et des accidents de travail

Reste la question de la facture. « Tout a un prix, mais tout a un coût », a répondu d’emblée Jean-Philippe Sabathé qui plaide en faveur d’un calcul qui prenne en compte l’ensemble des facteurs : un plus grand confort des patients et résidents, de meilleures conditions de travail pour les soignants. Mettre à disposition un fauteuil qui permet de s’asseoir seul permet de ne plus solliciter une aide. Cet environnement de travail fait gagner du temps soignant, tout en limitant les ports de charge et les accidents de travail. « Le coût d’un accident du travail provoqué par la manutention d’un patient est évalué à 10 000 euros », a rappelé le responsable de la prévention des risques professionnels au groupe hospitalier Paris Saint-Joseph.

Retenir des matériels plus appropriés a des conséquences palpables sur les arrêts de travail, même s’ils ne représentent pas les seuls indicateurs. Laetitia Giubbi a cité le cas d’un établissement de la région montpelliéraine qui a choisi d’investir dans du mobilier adapté. En 2020, le nombre de jours d’arrêts de travail atteignait 417 jours, dont 277 occasionnés par des transferts de personnes. Un an après, leur nombre était descendu à 51 jours, dont 30 causés par de la manipulation de résidents. Et il a atteint zéro jours entre janvier et mai de cette année. La même tendance a été observée au groupe hospitalier Saint-Joseph, passé de plus de 2000 jours d’arrêts à cause de la manutention à moins de 100 jours, grâce à sa politique de prévention et ses achats.

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