Plexus, la plateforme logistique qui travaille à fond la caisse

En unissant leurs efforts et leurs ressources, les CHU de Lausanne et de Genève ont réussi à se doter d’une plateforme logistique de pointe, certainement unique en Europe. Baptisée PLEXUS-Santé, en grande partie automatisée, elle déconditionne 80% des consommables livrés par les fournisseurs, avant de les entreposer dans 58 000 caisses que manipulent 9 transstockeurs ultra-rapides. Un système qui fonctionne comme une horloge suisse et qui fournit près de 200 rolls chaque jour aux unités de soins des deux établissements romands.

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De prime abord, rien ne distingue le bâtiment, installé chemin de Mochettaz à Bussigny, au bord d’une rocade, à quelques kilomètres du centre-ville de Lausanne. Une plateforme logistique de facture classique, avec ses traditionnels quais d’embarquement. À l’intérieur, c’est une autre histoire. Et la promo 2023 de l’ADéLH, programme certifiant de formation en supply chain (imaginé par le Resah et l’École des mines de Saint-Etienne, lire notre article du 15 février 2022), avait les yeux écarquillés en découvrant les lieux. Car PLEXUS (pour PLateforme EXterne pour les Unités de Soins) Santé, opérationnelle depuis 2019, est certainement le seul magasin hospitalier aussi automatisé en Europe.

Essentiellement des consommables à forte rotation

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Exploitée par une « société simple » – contrat de droit suisse par lequel deux ou plusieurs personnes conviennent d’unir leurs efforts ou leurs ressources en vue d’atteindre un but commun (NDR) – créée conjointement par le Centre hospitalier universitaire vaudois (CHUV, 1500 lits), très en pointe en matière de logistique (lire notre article du 9 septembre 2020) et les Hôpitaux universitaires de Genève (HUG, 2000 lits), les deux plus importants établissements de la Suisse romande, la plateforme, ouverte « non-stop » de 6 heures à 18 heures, grâce à une équipe d’une vingtaine de personnes, fonctionne sur le principe de la marche en avant.

D’abord une partie réception, où livrent les fournisseurs. Une centaine de commandes à récupérer et à contrôler quotidiennement, le tout avec l’aide d’un ERP. Essentiellement des consommables très utilisés : masques, blouses, seringues, certains dispositifs médicaux, ainsi que des produits hôteliers. Pas de médicaments, pas de DMI type prothèses, pas de denrées alimentaires.

Déconditionnement sur place de 80 % des produits

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Au total, près de 3000 références au compteur. De plus en plus utilisées par les deux CHU. « Lorsque le projet a démarré, on n’avait que 15 % d’articles en commun dans les deux hôpitaux. A présent, après quatre ans, on est monté à 45 % », illustre Hussain Salad Hussen, responsable de la cellule technique de PLEXUS. Environ 20 % des produits, « hors gabarit », sont entreposés à l’ancienne sur des palettes et des racks (450 emplacements répartis sur 3 étages) avec une machine à cabine montante.

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Le reste (80 %), dit de « petit volume » est déconditionné sur place. Un gain de temps pour les soignants. Et la fin des emballages dans les étages des CHU qu’il fallait ensuite évacuer. Après avoir décartonné les produits, l’équipe PLEXUS-Santé les remisent dans des caisses au format standardisé (60 x 40 cm), pourvues chacune de code-barres et d’une puce RFID. Lorsqu’un nouveau produit arrive, l’opérateur saisit toutes les données logistiques de base (conditionnement, coefficient, code <EAN…) et estime combien il peut en placer dans la caisse. Par exemple deux packs d’endoscopie. La donnée est enregistrée par le système qui la conserve.

Mille caisses constituées en moyenne tous les jours

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En moyenne, 1000 caisses sont constituées par jour. Une fois leur couvercle refermé, elles poursuivent leur chemin sans l’aide de personne. Entraînées par un tapis roulant sur cylindre, elles prennent la direction de la zone de stockage composée de neuf allées capables d’accueillir 58 000 caisses jusqu’à plus de 10 mètres de hauteur. Dans chaque allée, un transstockeur se charge, à vitesse grand V, de les placer le plus intelligemment possible. Malin, il place les articles les plus souvent demandés au plus près de la sortie des allées. Tout est pensé afin de réduire le risque de rupture de stock. Les allées sont indépendantes les unes des autres. Et les articles sont répartis a minima sur deux allées.

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Lorsque les deux CHU effectuent leurs commandes de manière dématérialisée via un EDI, les robots, sans perdre une seconde, récupèrent les caisses idoines. Lesquelles sont ensuite acheminées, toujours par tapis, vers la zone de préparation des commandes. « Les transstockeurs effectuent jusqu’à 900 mouvements par heure », chiffre Hussain Salad Hussen. Grâce aux caisses de stock délivrées, un opérateur peut composer jusqu’à quatre caisses de livraison susceptibles d’être destinées à quatre unités de soin différentes (maternité, urgences, radiologie…).

Taux d’erreur de préparation de 0,3 %

L’ordinateur lui affiche combien mettre de boîtes et affiche toutes les informations : photo du produit, identité de celui qui passé commande, destination…. Une lumière verte, placée sur la zone de départ des caisses de livraison, lui montre dans quel réceptacle déposer le produit. Lorsqu’il a validé la fin de l’opération, la caisse refermée reprend sa route sur le tapis roulant jusqu’à la zone expédition, où un autre agent de PLEXUS se charge de composer les rolls. Quand il scanne le code-barres d’une caisse, le système lui indique dans quel chariot la charger.

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Tous les jours, Plexus assemble ainsi près de 200 rolls qui sont ensuite livrés aux unités de soins. Entre 8 à 10 camions font la navette vers les CHU chaque jour. « Nous sommes un peu un Amazon de la santé. On garantit une livraison le lendemain pour toutes les commandes passées avant 13 heures », assure Hussain Salad Hussen. Une simple statistique montre l’efficacité du dispositif. D’un côté, 15 000 lignes de commandes expédiées chaque semaine. De l’autre, un taux d’erreur de préparation atteignant… 0,3 %.

La traçabilité est un autre des nombreux points forts de PLEXUS. Comme les caisses sont scannées à chaque étape, la plateforme connaît sur le bout des doigts leurs déplacements. De quoi, au bout d’un certain seuil, déclencher leur nettoyage afin de garantir l’hygiène du conditionnement. L’excellence a évidemment nécessité des investissements : 17 millions de francs suisses pour le bâtiment, 6 millions pour la partie robotisation, et 1,9 million pour le système informatique.

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