Plateforme pharmaco-logistique  : le CHU Rouen passe dans une nouvelle dimension

Inaugurée fin septembre 2023, la nouvelle plateforme pharmaco-logistique du CHU de Rouen, implantée à Grand Quevilly, gère l’approvisionnement, le stockage et la préparation des commandes des produits de santé et hôteliers. Loué, l’entrepôt a changé la donne. Le doublement de la surface associé à des équipements modernes améliore les conditions de conservation des produits, ainsi que la qualité de vie au travail des agents. Mais le nouveau site, en regroupant les équipes, a aussi permis de rapprocher les expertises.

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Avant : 3000 m2, divisés en deux magasins. L’un à Bois-Guillaume essentiellement pour les produits généraux et les DMS. L’autre à l’hôpital Charles Nicolle, en centre-ville, pour les médicaments. Aujourd’hui : une plateforme pharmaco-logistique de 5600 m2, située à Grand Quevilly, à environ 9 km du site principal du CHU. Ce regroupement est le fruit d’un travail de plusieurs années. Confronté en effet à la saturation et à la vétusté de ses espaces, l’établissement normand envisageait, dès 2018, de trouver un nouvel endroit capable d’accueillir près de 2400 références de médicaments, 550 côté DM et 400 s’agissant des produits généraux.

Le choix de la location

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Plus facile à dire qu’à faire. Car l’offre de qualité n’est pas pléthorique dans l’agglomération rouennaise. Et les sites visités ne collent pas forcément au besoin. Lorsqu’il apprend que l’entreprise Ferrero cède l’un de ses entrepôts à un promoteur, le CHU saisit l’occasion. Et loue le bâtiment grâce à un bail de 9 ans. Montant du loyer, charges et taxes comprises : 500 k€/an. Un montage original. « Cette formule est intéressante, lorsqu’on compare les délais et les coûts, surtout s’il avait fallu construire un entrepôt neuf, avec un investissement oscillant entre 7 et 10 millions d’euros », argue Ronan Talec, directeur des achats, de l’hôtellerie, de la logistique et de l’ingénierie biomédicale (DAHLIB).

Avec l’aide de la direction des travaux du CHU, la plateforme, qui accueillait jusqu’alors des délices chocolatés, est sécurisée et réaménagée pour un usage hospitalier. Avec un secteur tertiaire notamment, permettant d’accueillir tous les gestionnaires de commandes, pharmacie et produits généraux, désormais voisins de bureau. Et qui partagent désormais un outil informatique WMS unique. « C’est aussi une avancée très importante dans notre projet logistique », remarque Ronan Talec, partisan du rapprochement des deux mondes. « On a tout à gagner à rassembler les expertises, pour servir ensemble les unités de soins », se réjouit-il.

Ensemble, mais séparés

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Opérationnel depuis janvier 2023, le site a été officiellement inauguré en septembre. Ce qui frappe visuellement lorsqu’on découvre l’endroit pour la première fois, c’est sa configuration : un espace ouvert, facilitant les flux internes des produits, mais avec des espaces de travail bien distincts, produits de santé et produits généraux ne se mélangeant pas.

Une allée centrale symbolise la frontière. À gauche, la pharmacie. À droite, l’hôtellerie. Une séparation surveillée par deux caméras. Car le risque d’intrusion n’est pas nul. « La nuit, lorsqu’il n’y a pas d’activité, les caméras déclenchent l’alarme si quelqu’un traverse la zone », signale Valérie Pelletier, pharmacienne et responsable des approvisionnements en produits de santé.

90 000 boîtes pour la zone robotisée

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Si la première étape (réception des marchandises) et la dernière (expédition aux services) sont mutualisées, la pharmacie garde la main sur le déconditionnement et la vérification des produits de santé, leur rangement et la préparation des commandes. En fonction de leur nature, les médicaments sont stockés dans des espaces spécifiques : sur étagère dynamique, en chambre froide, dans un périmètre clos pour les stupéfiants, ou dans un robot de stockage et de dispensation globale.

Infatigable, le robot prend en charge 68 % des références. « Il range ce qu’on lui donne, sort ce qu’on lui demande, en privilégiant les médicaments qui se périment plus vite en premier. Et, entre deux, il optimise son rangement », détaille Valérie Pelletier. Grâce à la nouvelle plateforme, la zone robotisée a pris de l’ampleur. Sa capacité a presque doublé, passant de 57 000 à 90 000 boîtes.

Tout pour la marche en avant

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Dans le périmètre des palettiers, royaume des produits stockés, la ligne de démarcation entre produits de santé et hôteliers est rappelée par des panneaux. Cependant, la dizaine de magasiniers-préparateurs de commande travaille, de manière alternée, des deux côtés. Comme dans le reste du bâtiment, tout a été réfléchi en fonction de la « marche en avant », c’est-à-dire éviter que les agents ne reviennent sur leurs pas ou perdent du temps. De l’implantation des racks à la feuille de route fournie par le WMS avec les produits à récupérer et leur quantité. Les conditions de travail des agents ont aussi été améliorées. Plus besoin de pousser ou de tirer des chariots grâce à l’achat d’engins autoportés.

Si produits de santé et produits généraux font l’objet de préparation séparées, les commandes sont consolidées en fonction du site géographique visé. « Nous avons organisé nos couloirs d’expédition, de manière à charger pour tout un bâtiment lorsque le chauffeur arrive », explique Sabine Rassent, responsable de la supply chain. « La circulation des flux est primordiale pour rendre les choses claires », insiste-t-elle. Le CHU a tiré profit du travail préparatoire, appuyé par des visites dans d’autres établissements. « Nous avons vu des choses intéressantes et d’autres qui ne convenaient pas à notre projet », résume Laurent Vandike, responsable d’exploitation de la plateforme.

Un possible destin GHT

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Une fois les commandes prêtes, la flotte du CHU de Rouen entre en jeu. « Nous avons 6 à 8 tournées par jour, côté poids lourds. Plus 7 navettes quotidiennes à horaires définis pour le non programmé, ce qui permet aux unités de faire des commandes urgentes au décours de la journée », indique Grégoire Verhasselt, responsable du département logistique. Avec un seul point de livraison pour les fournisseurs, à la périphérie de Rouen, le bénéfice environnemental est palpable. Seuls les camions du CHU entrent désormais dans Charles Nicolle. « On a réduit de 50 % le trafic routier de marchandise dans le centre-ville », chiffre Ronan Talec.

De gauche à droite : Laurent Vandike, Sabine Rassent, Ronan Talec, Valérie Pelletier et Grégoire Verhasselt.

Avec ses mètres carrés supplémentaires, le site de Grand Quevilly a évidemment modifié le scénario. 25 jours de couverture pour les produits hôteliers. 21 côté pharmacie. « On donne plus de profondeur de stock à certains produits sensibles », assure le directeur de la DAHLIB. D’autres, comme des solutés massifs, jusqu’ici confiés à des prestataires faute d’espace, vont revenir dans le giron de l’hôpital début 2024. Ces nouvelles conditions d’exercice promettent probablement la plateforme à un destin territorial. « Elle a été dimensionnée pour le GHT si besoin. Le modèle juridique reste à identifier. Il faudra évidemment des investissements préalables, par exemple pour adapter les systèmes d’information mais c’est possible », promet Ronan Talec.

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