La 2e vie de la plateforme médico-logistique du GAPM

Au bord du gouffre en 2017, la plateforme médico-logistique du groupement audois de prestations mutualisées (GAPM) a depuis redressé la barre de manière spectaculaire. Grâce à un personnel motivé, des prestations de qualité et des prix attractifs, elle conquiert désormais de plus en plus de nouveaux membres, EHPAD et écoles. Et elle a l’ambition de devenir une « maison commune » de services élargis au bénéfice des organismes audois qui en ont besoin.

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3900 repas mitonnés et 9 tonnes de linge nettoyés quotidiennement. Sans oublier les centaines de piluliers confectionnées par la PUI. Un chiffre d’affaires de 43 millions. C’est un peu la vie en rose aujourd’hui à la plateforme médico-logistique (PML) du GAPM. En plein boom, le GCS (28 adhérents) ne cesse d’attirer de nouveaux membres. Dont une quinzaine d’écoles depuis le début de l’année.

Un petit miracle.  Il y a sept ans, cet outil était quasiment moribond et promis à la casse. Créée en 2010, la plateforme naît d’une sorte d’effet papillon. Lorsque l’hôpital de Carcassonne lui soumet un projet de reconstruction de sa MCO, l’autorité de tutelle répond que la modernisation de son unité de production des repas est un préalable. Germe alors l’idée – avant-gardiste – d’une plateforme regroupant magasin, cuisine centrale, blanchisserie et pharmacie au bénéfice de plusieurs établissements.

Un BEA plombant

Très en vogue à l’époque, la voie du partenariat privé-public (PPP) est choisie. De quoi transférer l’investissement nécessaire (34 millions) à un opérateur privé. Propriétaire du terrain, le CH de Carcassonne signe un bail emphytéotique administratif uniquement avec le groupement retenu. A charge pour l’emphytéote de concevoir, construire et maintenir le bâtiment pendant une période de 27 ans.

Cette mécanique contractuelle va devenir un boulet. Simple exploitant, le GCS, qui s’est constitué entre six structures, n’a pas voix au chapitre. Il ne peut rien négocier. Ni le renouvellement des machines. Ni le montant du loyer, près de 3,5 millions à régler par an, quelles que soient les variations de l’activité.

La situation dérape. Car tous les adhérents du GCS ne sollicitent pas la PML à hauteur des espérances. Chaque année, le déficit gonfle, jusqu’à atteindre 8,2 millions -en cumulé- fin 2017. L’argent manque pour régler les fournisseurs. Le personnel perd confiance. Son travail est décrié. Un adhérent choisit même de quitter le navire, emmenant avec lui 40 % de la production des repas… C’est le cycle infernal.

Redonner confiance

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Jusqu’alors en poste au CH de Castelnaudary, Georges Saint-Jevin prend la direction du GCS pour le sortir de cette « crise permanente ». Il est convaincu du potentiel de la PML et de ses agents, « coupables de choses dont ils n’étaient pas responsables ». La reprise en main passe par une remotivation des troupes autour d’un projet commun et de la recherche des performances métiers.

« Il a fallu aussi expliquer aux adhérents du GCS qu’ils n’étaient pas de simples consommateurs. Tout le monde devait se mettre autour de la table et trouver des solutions », expose Georges Saint-Jevin. « Nous nous employons alors à réaliser des gains de gestion en étudiant chaque poste de dépense, y compris au niveau des RH pour privilégier les postes à valeur ajoutée, et tenir compte de notre baisse d’activité en matière de repas », ajoute-t-il.

Ces efforts portent leurs fruits très rapidement :  dès 2018 un premier excédent de 150 000 euros est dégagé. L’hémorragie financière est jugulée. La survie passe aussi par la résiliation du BEA. « J’ai épluché le contrat et je me suis aperçu que l’emphytéote n’exécutait pas parfaitement ses obligations », précise le directeur. La société accepte le principe d’une résiliation à l’amiable en 2021. Le GCS a désormais les mains libres.

Une journée des réussites le 15 mai

Georges Saint-Jevin

Grâce à la hausse de la productivité, les tarifs ne bougent pas malgré l’inflation. « Nous ne les avons jamais augmentés depuis mon arrivée, nous les avons même diminués pour le repas », précise Georges Saint-Jevin. L’équation « prix attractif + qualité retrouvée = nouveaux clients » fonctionne. Après visites et dégustations, plusieurs collectivités, via leur CCAS ou CIAS, sont convaincues.

Et au fur et à mesure de l’échéance de leurs marchés, elles confient des prestations au GCS. « « L’activité repas a augmenté de 15 % depuis le début de l’année. Et en septembre, elle devrait encore s’accroître de 15 % », estime le directeur. Après six années excédentaires, le déficit – en cumulé – est quasiment résorbé. En 2025, il ne devrait être qu’un (mauvais) souvenir.

Comme un bonheur n’arrive jamais seul, le personnel (128 personnes) a pris une nouvelle dimension. « Nous faisons en sorte que les agents soient reconnus et se reconnaissent membres d’une équipe à part entière », résume Georges Saint-Jevin.  A l’exemple des chauffeurs « premiers ambassadeurs » de la plateforme.

« Ils ne sont pas que des livreurs : ils connaissent parfaitement nos processus en restauration et en blanchisserie, de manière à repérer le moindre dysfonctionnement pour le faire remonter immédiatement. » Ou des cuisiniers chargés des réceptions qui ont été dotés de tuniques brodées, comme dans les grands restaurants. Le GCS continue de cimenter la cohésion par la convivialité. Le 15 mai, une « journées des réussites individuelles et collectives » mettra à l’honneur les agents et soulignera tout le chemin parcouru.

La « maison commune » de services dans l’Aude

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Grâce à son ancrage territorial, la plateforme, que Georges Saint-Jevin définit comme « une maison commune », compte bien surfer sur la dynamique, en apportant une palette de solutions aux différentes structures audoises qui en ont besoin. Y compris des prestations intellectuelles, à l’image de la maintenance d’installations électriques ou frigorifiques. Ou de mise à disposition de diététiciennes.

« Les EHPAD ne peuvent pas recruter une diététicienne à temps plein. Nous disposons d’une équipe territoriale qui peut intervenir dans plusieurs établissements. Et tout cela à prix coûtant. Nous n’avons en effet pas vocation, en tant que GCS de droit public et à but non lucratif, à faire des profits. »

Le portage de repas à domicile, pour les écoles et les crèches est également dans les tuyaux. « Nous pouvons aussi fournir du linge aux foyers d’accueil pour les adultes. Toutes ces pistes seront travaillées au fur et à mesure des besoins qui nous sont adressés ». Une stratégie logique.

Un food-truck itinérant

« La durée de séjour décroît dans les hôpitaux. Demain, avec le développement de l’hôpital de jour, nous perdrons peut-être les repas du soir ; de même dans les Ehpad l’âge d’admission augmente, il y aura de moins en moins de repas « normaux », il nous fait donc aller chercher de nouveaux segments vers des populations jeunes », argue le directeur du GCS, dont le credo est la « mutualisation sans dépossession ». « Le but, c’est de bâtir avec tous ces organismes un socle de développement d’activités en interagissant, plutôt qu’en imposant notre façon de faire », martèle-t-il.

Le GAPM fourmille de projets pour valoriser le savoir-faire des équipes hors les murs. Un food-truck itinérant, capable d’aller d’EHPAD en EHPAD, devrait voir le jour cette année. « Je pense que cette plateforme est allée bien au-delà de ce que les pères fondateurs avaient pu imaginer. Mais elle n’a pas encore fini de nous surprendre », conclut Georges Saint-Jevin en rappelant l’appui total accordé par les deux administrateurs successifs (Alain Guinamant et Jean-Marie Bolliet) et la confiance constante de l’ARS Occitanie : « sans eux, sans leur aide et leur adhésion, ce GCS ne serait pas devenu ce qu’il est, chacun d’eux y a cru autant que moi ».

 

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