La tenue banalisée des soignants va devenir de plus en plus banale

D’ici quelques années, les étiquettes cousues ou thermocollées avec les noms et fonctions des soignants devraient disparaître de leur blouse ou de leur tunique. Car l’exploitation des stocks tourne mieux avec des tenues banalisées. Moins de pertes et de vols. Et plus de disponibilité.

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Les syndicats sont demandeurs : si cela peut éviter au personnel de manquer de tenues ! Les responsables de blanchisseries aussi. « Le taux d’exploitation de notre stock de tenues nominatives est de 30 à 40 % ; 90 % quand elles anonymisées », raconte Andy Nguyen, responsable de la blanchisserie du groupement Santalys, dans le Var.

Doucement mais sûrement, la distribution automatique de tenues banalisées et même pliées s’impose comme le meilleur système dans les blanchisseries hospitalières françaises. Après des années où la priorité était que le soignant soit reconnu individuellement par son nom et sa fonction inscrits sur sa blouse ou sa tunique. Après des années aussi de distribution sur cintres, là où on a eu la place pour le faire. Mais elle a buté sur ce nécessaire besoin de m 2.

Habitudes de change

Andy NGuyen

Le mouvement n’est pas encore massif. Andy Nguyen, qui est aussi président de l’URBH (Union des responsables de blanchisseries hospitalières) estime que 10 % et 15 % des blanchisseries ont franchi le pas. Mais il paraît inéluctable. L’épisode de la Covid a marqué un tournant.

Quand le rythme de changement de tenues s’est accéléré chez les soignants, les établissements déjà passés à la tenue banalisée ont suivi plus facilement la cadence. Depuis, les soignants ont conservé une habitude de change plus rapide. Pour Vincent Pacton, responsable d’exploitation du GCS Charente Maritime Nord blanchisserie, l’augmentation de son stock de tenues en est restée supérieure d’un peu moins de 20 %.

Le grand avantage de la distribution de tenues banalisées est la qualité de l’offre apportée aux soignants. En Charente-Maritime, Vincent Pacton en propose en six tailles et six couleurs différentes. Le soignant qui veut en changer au cours de son service peut remettre la sienne au sale et en trouver une propre plus sûrement que s’il ne comptait que sur sa dotation personnelle. La blanchisserie lui apporte cette garantie plus facilement avec des tenues banalisées. Le confort du personnel y trouve son compte.

Moins d’immobilisation, moins de pertes

Pour Andy Nguyen, dans le Var, l’avantage de la tenue banalisée est aussi clairement économique. Elle lui a permis d’abaisser ses stocks de tenues. Il en prévoit trois à quatre jeux par personne, contre sept à dix quand elles sont nominatives. « Il ne faut pas sous-estimer l’importance des vêtements qui dorment dans le placard individuel de chacun quand ils sont personnalisés. Ne serait-ce qu’au moment des absences, congés, maladie et autres. Globalement, cela représente pour nous un capital financier non-exploité significatif. »

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A l’inverse, les tenues banalisées tournant davantage s’usent plus vite et sont aussi à remplacer plus souvent. L’un finit par compenser l’autre. Mais l’un des enjeux pour lequel le recours à la tenue banalisée a le vent en poupe, c’est qu’elle offre le moyen de limiter les pertes et les vols de tenues. Pas seulement en soi. Mais à la condition expresse de l’assortir d’une distribution automatisée.

Le problème du coulage

Vincent Pacton en administre la meilleure preuve chez son adhérent qui a choisi ce système. Simplement déposées dans des étagères, les tenues disparaissent ou sont vite détériorées. Il en perd 20 à 30 %. Aussi réfléchit-il avec son adhérent à l’installation de distributeurs automatiques. Le vêtement identifié par un puce RFID est distribué au personnel par le biais de son badge professionnel ou d’un code. Il reste sous sa responsabilité le temps qu’il l’utilise. Et quand il le remet au sale, il retrouve le droit de prendre une nouvelle tenue. « Dès que le personnel sait qu’il est contrôlé, il y a beaucoup moins de pertes », remarque Vincent Pacton.

Vincent Pacton

Il le constate sur la section « tenues nominatives » de sa blanchisserie, qui représente encore 70 % de son activité. Les deux personnes employées à l’apposition de l’étiquette thermocollées et à la pose d’un code-barre sur le col surveillent aussi ce que deviennent ces tenues. En croisant notamment leurs fichiers avec ceux des ressources humaines. « Le coulage, chez nous, c’est plutôt du côté des tenues banalisées. Nous renouvelons sans cesse le stock mais c’est sans fin. Parfois, nous manquons de tenues pour le personnel », note Vincent Pacton.

En plus de la rotation des stocks qu’elle assure, le contrôle qu’elle permet conduit donc des établissements à songer à la distribution automatique de tenues banalisées. L’inconvénient est qu’elle coûte cher. « Si l’on choisit cette solution seulement parce que les gens ne font pas suffisamment attention à ce qui leur est confié, le ticket est cher ! », prévient Andy Nguyen.

Ticket encore élevé

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Un distributeur automatique coûte au bas mot 100 000 €, ce qui peut suffire pour un établissement de 500 employés. Il en faut plus dans un établissement plus gros. Le budget peut atteindre 2 ou 3 millions d’euros à partir de 10 000 agents. 15 millions d’euros pour une grosse blanchisserie inter-hospitalière. « Ce sont des technologies simples et très fiables, note Andy Nguyen. Au bout de 10 ans d’un matériel qui a coûté 1,2 million d’euros, j’ai dépensé 300 000 € de remise à niveau. Nous sommes bons, à nouveau, pour 10 ans. Après plusieurs grandes évolutions, c’est un système de distribution qui apparaît globalement satisfaisant et au point. En plus de la sécurité qu’il apporte, les dépenses qu’il occasionne doivent aussi être pensées globalement, en fonction de la qualité de vie fournie aux soignants ».

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