Le CHU de Limoges se met en frais pour la surgélation

Profitant de la construction d’une nouvelle unité centrale de production, le CHU de Limoges a décidé de passer à la surgélation d’une carte brasserie composée de petits plats « maison » pour les patients en court séjour. Objectif : geler les dépenses dues au gaspillage alimentaire. Pour arriver à ses fins, l’hôpital s’est réorganisé et a investi dans du matériel plus adapté, socles rouleurs, cloches et assiettes en porcelaine.

La nouvelle assiette en porcelaine © CHU Limoges

« Matières premières à DLC (dates limites de consommation) trop courtes, menus trop restrictifs qui ne satisfont pas les convives, préparations à J-3 tenant plus de la cartomancie que de la gestion… C’est simple : en restauration hospitalière, on a toujours faux ! », introduit d’emblée Christophe Samson, responsable dudit secteur au CHU de Limoges…

Des erreurs d’appréciation par trop onéreuses, « jusqu’à 30 % des achats gaspillés, ce qui devient de plus en plus intolérable », poursuit le professionnel. Mais comment donc diminuer ces pertes sans baisser le service ? À cette question brûlante, l’établissement limougeaud oppose sa réponse : la surgélation.

Des avantages qui ne laissent pas de glace

L’objectif est de substituer à l’habituelle logique de « flux poussé » celle de « flux tiré » fondé sur un déstockage corrélé à la demande (lire notre article du 3 novembre 2020). La solution s’adresse exclusivement aux patients de MCO, dont le nombre et les régimes varient en continu. Ainsi, à ces convives auxquels est destinée la moitié des 5 000 repas quotidiens, sera ainsi présentée, dès mars prochain, une carte brasserie de 14 « plats maison » différents, tous conditionnés en assiette individuelle surgelée. Saumon tagliatelles, blanquette de veau, dahl de lentilles corail…

Conçu avec des diététiciens pour répondre aux restrictions les plus fréquentes et donc couvrir 70 % à 80 % des patients en court séjour, le nouveau processus affiche franchement ses multiples avantages : « une conservation maximisée des denrées, des productions déstockées chaque matin, au plus près des besoins de la journée, et une offre beaucoup plus adaptée aux goûts de chacun. Résultat : une optimisation de l’activité à chacune des trois étapes majeures du gaspillage », s’enthousiasme Christophe Samson.

Près de 30 000 assiettes en stock

Pour autant, le changement de pratique n’est pas anodin, exigeant autant des structures que des organisations et des personnels. « Il y a d’abord la question centrale de la place », reconnaît le responsable. Le passage au « make to stock » (MTS) ou à la production sur stock en français ne peut assurément se réaliser sans l’espace nécessaire pour entreposer les produits « pré-fabriqués » en attente de leur demande.

© CHU Limoges

À raison de 8 choix proposés chaque jour, soit 4 par repas, et de 2000 assiettes confectionnées par recette, l’opération limousine aligne ainsi 28 000 assiettes emmagasinées à l’année dans une chambre froide négative de 170 m2. « Le process est donc plutôt à envisager à l’occasion d’un projet de restructuration, voire de construction comme c’est ici le cas », convient Christophe Samson, et ce sans oublier que des lieux de stockage d’une quarantaine de mètres carrés s’avèrent tout aussi nécessaires sur les sites de distribution afin d’y conserver les commandes du jour.

Le moins de manipulations possible

© CHU Limoges

L’évolution emporte aussi une sacrée réorganisation du travail et des techniques professionnelles. En cuisine, le plan de travail dédié aux menus traditionnels (ULSD, SSR, Ehpad) côtoie désormais celui où se mitonne la carte brasserie dont les plats doivent cuire davantage afin d’éviter toute humidité excessive avant la surgélation.

Placées par caissettes de quatre, quatre-vingts assiettes de même recette et de même lot sont ensuite transportées en chambre froide sur un socle rouleur (600 unités achetées dont quelque 400 destinées au seul flux surgélation), « le même qui, le moment venu, sera utilisé comme navette jusqu’au lieu de distribution, de manière à limiter les efforts des agents », décrit Christophe Samson. Allotis sur place en fonction des commandes du jour, les plateaux décongèlent alors à température ambiante avant d’être réchauffés et servis sur les chariots repas habituels.

Nouvelles cloches

Enfin, et toujours dans le but de faciliter les manipulations, 28 000 assiettes originales se sont aussi invitées à la table des appels d’offres, « assiettes dont – Limoges oblige ! – la fabrication devait être de porcelaine et dont la forme favorisait une meilleure préhension », explique le responsable restauration. L’innovation a évidemment son coût supplémentaire, malgré des tarifs préférentiels.

© CHU Limoges

« Mais grâce à une nouvelle cloche inox, elle aussi totalement redesignée pour ce marché (absence de poignée notamment), l’ensemble affiche sur cinq ans un ROI équivalent à celui des barquettes plastiques », livre-t-il. Un rendement dès lors consacré par les économies drastiques réalisées sur le gaspillage, soit 300 K€ annuels pour une réduction estimée entre 10 et 15 %. Et une surgélation qui, malgré ses divers coûts – dont des dépenses d’énergie à ce jour non précisées – pourrait donc bien avoir raison des plus frileux.

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