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Les pharmaciens hospitaliers se mobilisent contre les MNU

Mobilisés autour du Club Pharma du C2DS, des pharmaciens hospitaliers s’apprêtent à mesurer le gaspillage des médicaments. Avec un but ultime : objectiver ces déchets pour mieux les éviter. Appel est lancé aux établissements et aux étudiants pour mener cette étude le plus largement possible.

© Epictura

C’est décidé, les pharmaciens hospitaliers partent à la chasse aux déchets issus des médicaments (Dimed), c’est-à-dire les médicaments non utilisés (MNU) et éliminés. Telle est la campagne démarrée par le Club Pharma (lire notre article du 7 février 2023 ) du Comité pour le développement durable en santé (C2DS), comptant désormais 201 professionnels membres.

Avec le C2DS, Convergence Infirmière a exposé des médicaments et DM gaspillés sur la Place du Capitole à Toulouse pour sensibiliser le public aux MNU

Tout est parti d’une autre opération baptisée « BalanceTonGaspi » menée en partenariat avec ce Comité et le syndicat Convergence Infirmière. Pendant un mois, douze cabinets infirmiers représentatifs de la diversité d’exercice ont récupéré les médicaments et dispositifs médicaux gaspillés chez leurs patients à domicile.

Bilan des « courses » : on peut extrapoler à 123 millions d’euros la valeur de ces déchets et leur empreinte carbone à 655 000 tonnes équivalent CO2 par mois. Un choc pour les pharmaciens des pharmacies à usage intérieur (PUI) qui savent bien que les pertes sont importantes aussi dans leurs établissements.

12 établissements déjà dans la boucle

Actuellement « une douzaine de PUI d’établissements sanitaires forment un groupe de travail pour évaluer en euros puis en équivalent carbone, puis en poids, le gaspillage des médicaments à l’hopital », annonce Véronique Molières, directrice du C2DS, en sortant de la deuxième réunion de ce copil le 18 juin dernier.

Le projet a plusieurs types d’objectifs : améliorer le bilan carbone des établissements, réaliser un bénéfice économique, mais aussi environnemental (en réduisant la pollution des eaux et plus généralement l’impact sur la nature), et enfin social. « Ce gaspillage n’est plus toléré par les soignants. Le réduire constitue une manière de redonner du sens à l’organisation et au métier, quel qu’il soit : infirmier, pharmacien… », observe Véronique Molières.

Un appel à toutes les PUI

Les PUI engagées dans le groupe de travail entendent d’abord faire recenser les médicaments, mesurer leur quantité et estimer pourquoi les produits en arrivent-là : produit périmé/altéré ? Erreur de prescription/de livraison ? Essai clinique ? Un document Excel sera prêt début septembre pour homogénéiser les réponses.

Véronique Molières

Seront analysés, dans un premier temps ceux en stock en PUI et dans les services, puis dans un second temps, ceux circulant dans les services, avant une troisième phase qui agglomérera les résultats. « La première étape devra être menée cette année entre le 15 septembre et le 15 décembre, pendant 14 jours, des jours que chaque établissement pourra choisir à sa convenance », précise Véronique Molières, qui souhaite élargir l’étude au maximum d’établissement pour un résultat plus représentatif.

« Membres ou pas membres du Comité, toutes les PUI sont les bienvenues pour participer », confie Véronique Molières qui lance l’appel notamment aux facultés de pharmacie pour mobiliser les étudiants qui voudraient s’investir dans cette analyse nationale.

Bientôt une filière REP ?

L’objectif final est de valoriser des initiatives existantes mais aussi de formuler des solutions. « On peut par exemple imaginer une réflexion avec les industriels  (à l’image du scoring en train d’être mis en place avec le Syndicat national de l’industrie des technologies médicales, le Snitem, lire notre article du 14 décembre 2023) ou encore la création d’une filière REP (responsabilité élargie du producteur). Déjà fin janvier 2024, nous avions rendez-vous avec la DGS et la DSS et leur avions fait part de notre d’une sorte de Cyclamed à l’Hopital (structure chargée de de recueillir et transformer les médicaments non utilisés en officine, NDLR) », propose Véronique Molières.

« Nous avons senti une écoute, et ce d’autant qu’était représenté à cette rencontre le CH de Cannes qui a estimé à 500kg la quantité de ses médicaments jetés, chaque année, soit l’équivalent, si on extrapole, de 1500 tonnes dans les 3000 établissements français », détaille-t-elle. Des chiffres qui font leur effet : « On a été étonné par le volontariat immédiat des établissements pour cette étude sur le gaspillage alors qu’on sait que personne n’a de temps ».

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