Projet immobilier : et si on commençait par mieux construire… le prix ?

On le sait… Fixé en amont par le maître d’ouvrage et pierre angulaire du marché, le coût énoncé d’un bâtiment en France reflète rarement la réalité de la facture finale. Rien à voir avec la Belgique ou une démarche cadrée entre maître d’œuvre et maître d’ouvrage permet d’affiner l’estimation en même temps que s’affine le projet.

Maquette des Cliniques Universitaires Saint-Luc © M.Rémon & Associés/ VK Architects+Engineers

Bien que l’article L 242-4 du code de la commande publique permette une exception pour les « opérations de réhabilitation et de construction portant sur des ouvrages complexes », tout chantier débute, en France, par la définition d’un programme surdétaillé et une enveloppe prévisionnelle. Problème : pour être évidemment associée au premier, cette dernière n’en est pas moins déconnectée, fixée par le maître d’ouvrage et fruit de contraintes administratives plus que des réalités techniques. À cette règle d’un prix donné dès l’amont de l’APD que nul ne saurait ensuite modifier au risque d’être pénalisé, la Belgique oppose une démarche bien différente, fondée sur une détermination des coûts évolutive et concertée, au fur et à mesure de l’avancement du projet.

La compétition sur un plafond

Présentée par l’architecte belge Gaëtan Peeters (VK Architects) qui se tenait pour cela aux côtés de son homologue français Michel Rémon (Atelier Michel Rémon et Associés) lors des dernières Journées 2023 de l’ingénierie hospitalière, la formule tient en deux mots : un plafond et des métrés. Ainsi un plafond de construction « finançable » est-il défini au départ, fondé sur des tableaux de « catégories » précisant les montants de subvention octroyés pour les principaux services et fonctions, selon leur dimension et/ou activité, montants à indexer en fonction de l’année pour laquelle le calcul est réalisé.

Par exemple, une salle de bloc de 250 m2 sera financée 2 500 euros, un poste de dialyse (40 m2) se verra attribuer 2 200 euros et, sur la base de 126,5 m2, un lit en soins intensifs sera soutenu à hauteur de 1831 euros… Additionnés, ces divers éléments donnent donc – hors parkings et abords, spécifiques à chaque site – le fameux « plafond de construction », masse budgétaire maximale promise aux financements des communautés et régions et sur laquelle la compétition s’effectue.

Le vrai prix des choses

À l’exception du gros œuvre et de l’enveloppe bâtimentaire chiffrés plus classiquement, la programmation des besoins va ensuite s’élaborer au regard de ce programme basique, toujours par élément de surface et au fil de ces mêmes catégories qui encadrent aussi les parachèvements attendus a minima pour chaque type de locaux (sol en polybéton, carrelage, faux plafonds, ventilation…).

Résultat : les choix peuvent être régulièrement évalués en rapprochant leurs impacts financiers du fameux « budget cible » et, jusqu’au dossier d’adjudication (équivalent du DCE), les décisions prises en conséquence, à l’appui d’un « vrai prix » progressivement dégrossi. « À la fin de l’étape du projet, nous sommes même en mesure de produire une première liste d’articles du cahier des charges liée à un prix moyen indexé », assure Gaëtan Peeters.

La confiance pour assise

Depuis l’esquisse jusqu’au projet, la construction du prix de construction s’avère ainsi, en Belgique, une démarche itérative bâtie sur la transparence et le respect entre deux partenaires, en un mot « sur la confiance », insistait Michel Rémon. Et de rappeler qu’au programme des Cliniques universitaires Saint-Luc – seulement 25 pages pour un projet de 450 millions d’euros ! – pas une fois le mot « pénalités » n’était mentionné. Une excellente histoire belge à raconter.

Réagir à cet article

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *