Comment limiter les biodéchets réinterroge les repas au CH de Pézenas

Au centre hospitalier de Pézenas, la réflexion sur la limitation des déchets alimentaires mène à des changements inattendus au profit d’un temps de repas plus qualitatif. C’est l’occasion de revoir les menus pour qu’ils soient le plus consommés possibles. Mais aussi la façon de les servir. Car sur ce sujet, comme pour une sauce à base d’utile et d’agréable, tout est lié.

© CH Pezenas

Le bac de 400 litres destiné aux biodéchets au centre hospitalier de Pézenas installé depuis cet été ne suffit pas toujours chaque semaine ! Et pourtant la direction de l’établissement entend réduire ce volume à moins de 200 litres rapidement. Sa méthode : analyser les processus qui génèrent le déchet pour lutter contre le gaspillage tout en répondant à l’obligation réglementaire de mettre en place le tri des déchets alimentaires.

Partager le repas avec des résidents pour comprendre

Depuis le début 2023, des « repas partagés » sont organisés pour comprendre comment les résidents perçoivent les menus, le moment des repas etc… Une fois par mois, dans le restaurant dans la salle de restaurant de l’EHPAD du CH de Pézenas, le responsable de la restauration Jean-Marc Soto, les deux animatrices et une dizaine de résidents se retrouvent ensemble à table autour du menu du jour.

Chaque fois différents, ces derniers sont sélectionnés par l’équipe « animations » parmi des personnes aux besoins en texture différents (normal, mixé, haché), et de préférence au sein d’un même service afin qu’ils se connaissent déjà. « Cela nous permet d’apprécier le menu du jour, le gaspillage associé, la vision des résidents et leurs éventuelles attentes y compris sur les conditions hôtelières », précise Jean-Marc Soto.

Analyse régulière des déchets

Jean-Marc Soto

C’est là qu’on a pu entendre des remarques comme « Ils nous servent et s’en vont » ou « Parfois on voudrait du rab mais ils ne font pas de deuxième tour ». Le repas, que Jean-Marc Soto passe stylo en main, se transforme en enquête de satisfaction. « Ont-ils apprécié le gout, la température ? Souhaitent-ils plus de recettes locales ? ». Après près d’un an de repas partagés, il ressort que « la prestation alimentaire est appréciée et convient mais que des interrogations subsistent au niveau de l’hôtellerie au sein des unités de l’Ehpad », remarque Jean-Marc Soto.

En parallèle, le responsable de la restauration a effectué des pesées sur les plateaux avant/après un repas, dans chacun des services de l’établissement pour évaluer les consommations et les pertes. Objectif premier : calibrer en volume et en fréquence la mise en place de la collecte avec le prestataire. Désormais, l’analyse régulière des déchets dans le bac est prévue afin d’objectiver le niveau d’appréciation des menus dans le but de revoir ces derniers.

Choisir des protéines moins volumineuses

© Epictura

Manger une cuisse de poulet devient vite compliqué quand on perd en autonomie. En conséquence, la personne se décourage, ne mange qu’une partie de la ration pourtant calibrée pour ses besoins nutritionnelles, et les déchets sont nombreux. Désormais, on commande par exemple le poulet en filets. De plus, la quantité de viande a été diminuée et en parallèle les sauces et garnitures ont été enrichies en protéines végétales ou des produits laitiers… L’idée étant de proposer autant de protéines mais sur des volumes plus réduits, donc plus acceptables par les personnes plutôt vite rassasiées.

« On pense également à multiplier le manger main  », explique Jean-Marc Soto qui ajoute que la cuisson basse température est déjà privilégiée pour le rendu moelleux – donc plus facile à mâcher – des viandes ainsi mitonnées. « Offrir du ‘finger food’, c’est aussi respecter leur autonomie », souligne Catherine Fauzan, directrice déléguée du CH. Et pour adopter cette évolution des menus, toute l’équipe de la cuisine a, dès 2022, été formée à ces techniques de préparation pour des mets faciles à consommer sans couverts.

Mieux personnaliser le service

Catherine Fauzan

Face aux lacunes en termes de savoir-être, l’établissement envisage d’avoir recours à des formations ciblées. « Quand l’aide à manger est trop rapide, les personnes n’en peuvent vite plus », remarque Catherine Fauzan. « L’effort qualitatif en cuisine n’est pas forcément valorisé lors du service. Aussi on souhaite faire reprendre conscience au personnel de l’enjeu de l’alimentation et de la nutrition, et ce, de la cuisine au déchet en passant par le service. Nous allons les former à nouveau sur les quantités à donner, comment resservir, comment réinterroger les résidents communicants ou non pour obtenir un meilleur temps d’attention au moment du repas ».

Le CH a déjà commencé à trouver des solutions pour faciliter un service plus adapté, sans staff supplémentaire. Proposer davantage de manger main à des personnes autonomes permet de libérer du temps pour celles dépendantes d’une aide.  Les chariots repas ont été remplacés par des modèles plus maniables et plus ergonomiques. « En étant plus à l’aise pour servir, le personnel peut bénéficier d’un peu plus de temps pour les résidents », espère Catherine Fauzan. « Peut-être mettrons-nous tous les non autonomes au même endroit, mais on peut se donner les moyens de les accompagner. L’idée c’est que chacun ait un temps et une attention nécessaires », résume la dirigeante, qui entend aussi s’attaquer à l’organisation du travail pour limiter les interruptions de tâches. De quoi donner à chaque professionnel dédié au service du repas plus de chances de personnaliser sa mission.

Réagir à cet article

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *