L’intelligence artificielle au service de la prévention des épidémies

Pour le Professeur Vasilis Vasiliou de l’Université de Yale (Etats-Unis), cela ne fait pas de doute : l’intelligence artificielle (IA) est en train de révolutionner l’épidémiologie. En permettant d’analyser des bases de données complémentaires, l’IA permet de détecter précocement des maladies et d’agir de manière préventive. La plateforme de triage de patients imaginée par son équipe de chercheurs réussit à anticiper la sévérité de la Covid-19 chez les patients et la prévision d’hospitalisation.

Vasilis Vasiliou

Une équipe de chercheurs de l’université de Yale a mis au point une plateforme capable de prédire la gravité d’une maladie et la durée de l’hospitalisation des patients lors d’une épidémie virale. Cette plateforme triangule plusieurs ensembles de données pour faire des prédictions, en particulier les données cliniques des patients (prélèvements et examens réalisés, comorbidités) et celles liées à la métabolomique (l’étude des petites molécules liées au métabolisme cellulaire).

Prédire le nombre de patients qui auront besoin de soins intensifs

« Le modèle nous a conduits à identifier un panel de biomarqueurs cliniques et métaboliques uniques qui étaient très révélateurs de la progression de la maladie et permet de prédire les besoins des patients très peu de temps après leur arrivée à l’hôpital », écrivent les chercheurs dans l’étude. Cela permet de pouvoir prédire quels patients peuvent rentrer chez eux et lesquels auront besoin de soins intensifs. Ces connaissances sont précieuses en cas d’épidémie et de contraintes sur les ressources hospitalières.

Pour mener cette étude, l’équipe de chercheurs a collecté des données complètes auprès de 111 patients atteints de la Covid-19 admis à l’hôpital Yale New Haven au cours d’une période de deux mois en 2020 et de 342 personnes en bonne santé (travailleurs de santé) qui ont servi de groupe contrôle.

Les patients ont été classés dans différentes classes en fonction de leurs besoins de traitement, allant de l’absence de besoin d’oxygène à l’intubation. L’étude a identifié un certain nombre de métabolites élevés dans le plasma qui présentaient une corrélation distincte avec la sévérité de la Covid-19. Identifiés précocement, ces métaboliques permettent de repérer les patients les plus à risque.

Une plateforme à disposition des professionnels de santé

Pour le Professeur Vasilis Vasiliou, l’utilisation de plateformes d’analyse basées sur l’intelligence artificielle sera possible dans tous les hôpitaux. Il s’agit tout d’abord de définir la maladie cible. Une maladie cible peut être n’importe quelle maladie dont l’évolution de l’infection n’est pas bien comprise et qui varie au sein de la population. Toute nouvelle infection virale émergente ou pandémie est une maladie cible potentielle. De plus, toute maladie qui nécessite d’adapter les traitements et les interventions à chaque patient afin d’être efficace pourrait être considérée comme une maladie cible potentielle.

Le modèle de collecte des données doit être défini, données qui doivent inclure l’enregistrement de l’évolution de la maladie et l’état général du patient depuis son hospitalisation, les données démographiques, génomiques, métabolomiques et cliniques des patients, ainsi que les données de triage.

Dans le cadre de l’étude portant sur la Covid-19, l’équipe de recherche a développé un logiciel libre– le COVID Severity by Metabolomic and Clinical Study (CSMC) – qui intègre l’apprentissage automatique et les données cliniques pour aider à la gestion pré-hospitalière des patients et les classer lorsqu’ils arrivent à l’hôpital. Cette plateforme, mise à disposition des professionnels de santé, les aide à mieux gérer leurs patients.

Bien entendu, ces modèles ne remplacent pas les décisions médicales et doivent être utilisés principalement pour comprendre l’évolution d’une maladie lorsque de nombreux facteurs l’affectent. La mise en place d’un centre de métabolomique dans les hôpitaux pourrait réduire le temps d’attente entre le diagnostic et la proposition d’un plan de traitement.

Un potentiel révolutionnaire pour lutter contre toutes les épidémies

Selon Professeur Vasilis Vasiliou, l’utilisation de l’intelligence artificielle pour analyser des bases de données complémentaires est en train de révolutionner l’épidémiologie. En effet, cette discipline médicale reposait historiquement sur l’analyse a posteriori de questionnaires et bases de données. En intégrant l’analyse des données métaboliques et cliniques des personnes, il est possible d’avoir une approche préventive qui anticipe le développement des maladies.

Les équipes de chercheurs de Yale planchent sur de nombreux modèles : détection précoce de l’exposition à des produits chimiques, à des virus, à des médicaments ou des drogues, à l’alcool, à des conditions sociales comme la pauvreté ou la vie en milieu urbain… Toutes ces expositions ont un impact que le métabolisme qui, couplé à d’autres données, peuvent permettre de prédire le développement de maladies (et donc de mettre en place les mesures pour les prévenir).

Actuellement, les travaux du Professeur Vasilis Vasiliou portent sur l’analyse de grandes bases de données pour identifier des aliments qui aident à combattre la Covid-19 ou le cancer. Il étudie également les effets de l’huile d’olive dans la prévention de la maladie d’Alzheimer, mettant ainsi l’intelligence artificielle au travail afin d’assurer le bien-être futur de la population.

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