Victime de volumes insuffisants, de la diversité de son contenu et d’une législation exigeante, le verre médicamenteux brisait jusqu’alors tous les efforts entrepris en faveur d’une filière qui lui serait dédiée. Le CHU de Montpellier, par exemple, était en peine de trouver une solution il y a trois ans (lire notre article du 30 juillet 2021).
Cinq établissements pilotes
Mais ce passif n’avait pas suffi à arrêter Philippe Bru qui, en qualité de directeur des développements stratégiques de Suez pour la Nouvelle Aquitaine et l’Occitanie, s’était lancé en 2023 dans une nouvelle approche, avec l’appui de l’ADI régionale (lire notre article du 11 mars 2024).
Testée auprès de cinq établissements néo aquitains volontaires – CH et cliniques – la dynamique consistait alors à trier tous les flaconnages de verre sodocalcique vides mais non rincés (sirops, produits injectables…). Collectés puis transportés par le groupe industriel jusqu’à un centre de valorisation partenaire, ceux-ci y étaient alors débarrassés de leurs éléments plastiques, bouchons et sertissages pour être ensuite lavés, calibrés et enfin concassés.
Quatre fois moins cher qu’en DASRI
« Après un an, les résultats sont incontestablement positifs », se félicite Philippe Bru. D’abord dans les établissements où, à l’appui de seaux de 2 à 15 litres, le geste s’est implanté très vite, sans faute de pré-tri et pour des coûts jusqu’à quatre fois inférieurs au tarif des DASRI (de 28 à 40 euros la collecte de 600 litres/200 kilos, de 50 à 170 euros le traitement).
En termes de volume aussi, puisque sur les douze mois, 15 tonnes de verre ont ainsi pu être collectées, laissant augurer, en cas de déploiement, quelque 300 tonnes rien que sur l’échelle aquitaine. Une réussite enfin et surtout au regard des attendus industriels du « recycleur », lequel a trouvé à la qualité et quantité de calcin obtenu deux débouchés complémentaires garantissant son activité, l’un destiné à améliorer le caractère réfléchissant des peintures routières, l’autre voué à la fabrication d’isolant thermique.
Un accord national… jusqu’à Toulouse
Sur la base de ce constat, un accord national visant à pérenniser enfin cette filière est donc bel et bien en passe d’être validé entre Suez et l’acteur de la valorisation. Mais la transparence de ce succès présente toutefois un voile : « seul le site aquitain de notre partenaire dispose aujourd’hui des capacités permettant de valoriser le verre médicamenteux », regrette Philippe Bru. Résultat : un poste « transport » qui pourrait avoir une incidence non négligeable sur le coût de la dynamique.
Courbes isochrones à l’appui, le responsable local de Suez a donc calculé le rayon sur lequel le rapport restait en faveur du recyclage. Et il l’assure : « compte tenu des gains réalisés par rapport à un traitement DASRI, la solution de la revalorisation s’impose largement comme la plus économique, jusqu’à la région de Toulouse au moins. »
33 % moins impactant que l’incinération
Pour autant, la question interroge bien évidemment aussi en termes d’empreinte environnementale, laquelle ne doit pas non plus venir peser de tout son poids sur la démarche exemplaire. Or, là encore, Philippe Bru brandit sa calculette avec enthousiasme : « Jusqu’à 150 kilomètres de distance entre l’établissement producteur et le site de valorisation, le recyclage de 500 grammes de verre – soit une bouteille de 75 cl – affiche toujours un bilan carbone d’un tiers inférieur à l’incinération : 288 grammes d’équivalent CO2 émis/112 grammes d’équivalent CO2 évités dans le premier cas contre 333 grammes d’équivalent CO2 émis/69 grammes d’équivalent CO2 évités pour la seconde option. »
Les mesures d’empreinte sont maintenant en cours pour des distances supérieures, avec certains établissements d’ores et déjà positionnés dans les starting-blocks, et ce jusqu’en Bretagne. Difficile, il est vrai, de rester de marbre face à cette nouvelle filière verre…