« Nous avons voulu démontrer que les achats ne sont plus un centre de coûts mais de profits ». Directeur-adjoint des achats du GHT du Var, Hervé Signoret a beau mener sa barque dans le petit monde des achats publics depuis bientôt près de vingt ans, il a toujours le feu sacré. Pour preuve son idée de monter un partenariat du troisième type avec un industriel. Le but : revisiter de manière innovante certaines pratiques médicales au bénéfice des patients, avec un angle résolument RSE.
La préparation cutanée, premier champ d’expérimentation
La direction achats questionne le groupe Becton Dickinson France, présent au GHT dans beaucoup de domaines et donc capable d’avoir un regard transversal. Comment ce fournisseur pourrait-il contribuer rendre plus efficace l’organisation de soins, tout en assurant la sécurité des patients et soignants et en réduisant l’impact environnemental ? Le tout en restant évidemment compétitif.
Choisie principalement avec l’équipe d’hygiène et la pharmacie, la préparation cutanée est un premier terrain d’expérimentation. « C’est une étape commune à toutes les interventions chirurgicales », argue Hervé Signoret, un dossier idéal pour constituer « un sujet sponsor, duplicable en termes de dynamique achat sur l’ensemble du GHT ».
Exit donc la solution à base de Povidone, remplacée par la ChloraPrep™, un poil plus chère à l’achat. Le nouveau produit est testé à partir de 2023 au CHI de Toulon-La Seyne-sur-Mer, puis à l’échelle du GHT depuis le printemps. Au total, 300 opérations en chirurgie digestive.
Coût global de l’acte réduit de 21 %
Résultat, l’analyse en cycle de vie partielle – confiée à l’agence Primum non nocere – montre que le coût global de l’acte de préparation cutanée est réduit de 21 %. « Employer la solution à base de Povidone nécessite beaucoup de consommables et le produit, pour être efficace, doit être laissé un certain temps sur la peau du patient. Alors que ChloraPrep™ est employée avec un applicateur qui respecte plus facilement le protocole et permet aussi de gagner du temps », explique Hervé Signoret.
Quatre minutes et demie épargnées aux Ibode pour chaque procédure chirurgicale. Côté déchets, il n’y a pas photo. Dans le premier cas, 641 grammes pour une intervention. Dans le second, 62 grammes.
Au tour du traitement endovasculaire des occlusions artérielles
Encouragée, la direction des achats entame, il y a quatre mois, un second banc d’essai, cette fois, via l’innovation, pour le traitement endovasculaire des occlusions artérielles. En recourant à un dispositif médical (le Rotarex). « Ce DM réduit les actes de chirurgie lourde et est utilisé au lieu des pontages. Il prévient les risques, améliore les chances du patient, la récupération. Il simplifie la prise en charge des patients souffrant de thromboses veineuses : acte moins invasif, moins d’usage de soins intensifs, baisse de la durée moyenne de séjour, retour au domicile facilité, moins de déchets… », liste Hervé Signoret.
Un changement tout bénéfice aussi synonyme de bouleversement des pratiques des chirurgiens. « Nous avons organisé un groupe de travail avec l’appui de notre Délégation à la recherche clinique et à l’innovation (DRCI) qui apportera aussi son aide pour l’étude médico-économique ». Les praticiens, les pharmaciens auraient pu refuser la solution mais les équipes ont été convaincues par la démarche.
« Par le biais de l’achat responsable, la direction achat amène de la performance et donne du sens. Cette vision de l’achat est la meilleure des façons d’embarquer tout le monde », professe, convaincu, Hervé Signoret. « Elle redonne du sens au métier d’acheteur, en développant sa relation avec les métiers, particulièrement la communauté médico-soignante. Et elle contribue à la soutenabilité du système de santé », ajoute-t-il pour conclure.