En 2008, un centre hospitalier, par acte spécial, accepte une entreprise en qualité de sous-traitant pour exécuter une partie d’un lot de menuiserie extérieure d’un marché de conception-réalisation. À sa demande, la société obtient une avance de 20 %, soit la somme de 446 207,09 euros TTC. Placé en redressement judiciaire, le mandataire du groupement titulaire du marché revend certains de ses actifs. Mais comme le chantier ne reprend pas, la personne publique résilie aux torts en 2011. Elle informe le sous-traitant de la situation. Et lui réclame le remboursement de l’avance.
Le sous-traitant demande alors au tribunal administratif de la décharger de l’obligation de rendre la somme. Sa requête est rejetée en novembre 2015. La CAA en fait de même en 2018. L’affaire remonte au Conseil d’Etat lequel, en 2020, renvoie l’affaire devant la cour administrative d’appel. En décembre 2021, la CAA annule le jugement de TA. Le centre hospitalier demande alors au Conseil d’Etat d’annuler ce dernier arrêt et de régler l’affaire au fond.
Les sages du Palais-Royal rappellent que les avances accordées au titulaire d’un marché sur le fondement du code des marchés publics, applicable au litige, ont pour objet de lui fournir une trésorerie suffisante destinée à assurer le préfinancement de l’exécution des prestations qui lui ont été confiées. Ce dispositif s’applique aux sous-traitants bénéficiaires du paiement direct.
Il résulte de la combinaison des dispositions du CMP, dont la substance a été reprise par le Code de la commande publique (articles R. 2191-11/12 et R. 2193-17 et suivants), que le maître d’ouvrage peut récupérer les sommes avancées lorsque le marché est résilié avant un remboursement par précompte sur les prestations dues. Sous réserve des dépenses correspondant aux prestations prévues au marché et effectivement réalisées.
Dans le cas d’un sous-traitant, l’acheteur a la charge de s’assurer auprès du titulaire que ces conditions sont remplies. Par ailleurs, lors d’une résiliation pour faute, le remboursement de l’avance par le sous-traitant ne fait pas obstacle à ce que celui-ci engage une action contre le titulaire du marché.
Concernant ce contentieux particulier, le Conseil d’Etat considère que la CAA, en jugeant que la créance du centre hospitalier correspondant au remboursement des avances perçues par le sous-traitant n’était ni certaine, ni exigible au seul motif qu’aucun décompte de résiliation du marché n’avait été établi au préalable, a commis une erreur de droit.
En outre, les sommes présentées par la société au titre du stockage du matériel acquis en prévision du marché, des frais d’études et de la perte de marge brute du fait de la réalisation, « ne peuvent, dans les circonstances de l’espèce, être regardées comme des dépenses qu’elle a exposées et qui correspondent à des prestations prévues au marché et effectivement réalisées avant la résiliation de celui-ci. » Pour les magistrats, la société est seulement fondée à demander d’être déchargée de la retenue de garantie sur les acomptes versés.
Référence : Conseil d’État, 1er juin 2023, n°462211.