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Pharmaciens et industriels planchent sur le robot de demain

Le Club des utilisateurs d’automates de préparation des doses à administrer (CUAP) a interrogé ses membres pour imaginer les prochains robots. Objectif : identifier les attentes clés pour penser de manière plus universelle ces machines, en concertation avec les fabricants.

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Trouver le bon système d’automatisation pour sa pharmacie hospitalière s’avère complexe. Certains ont besoin de travailler avec des médicaments en vrac, d’autres avec des doses unitaires, tous attendent de l’interopérabilité et une machine robuste pour éviter de perdre en maintenance un temps précieux.

Un sujet compliqué

Les membres du CUAP réunis à Lille © CUAP

Tel est le principal enseignement d’un questionnaire adressé par le Club des utilisateurs d’automates de préparation des doses à administrer (CUAP) à ses 130 pharmaciens hospitaliers adhérents pour connaitre leurs attentes sur les armoires automatisées, les robots surconditionneurs, déconditionneurs et globaliseurs.

« Il y a 15 ans, on pensait que la pharmacie hospitalière serait le prochain secteur à disrupter avec la robotisation mais cela n’a pas été le cas. On a assisté à une croissance, mais timide. Aujourd’hui encore, les pharmaciens trouvent que déployer des robots de pharmacie reste compliqué », explique Etienne Cousein, pharmacien hospitalier actuellement en disponibilité, qui s’était vu confié, en début de carrière en 2008, la robotisation du Centre hospitalier de Valenciennes, puis en 2021, celle du CHU de Lille, et qui a présenté les résultats du sondage du CUAP avec son confrère Gilles Vitale, pharmacien au CHU de Toulouse.

Les fonctionnalités attendues

« Chaque hôpital fonctionnant différemment, il est difficile pour les industriels de concevoir un robot sans faire de l’ultra sur-mesure. Aussi chaque pharmacien doit adapter une solution industrielle avec son lot de contraintes », résume Etienne Cousein, par ailleurs fondateur et directeur scientifique de la startup PharmIA, éditrice d’une solution d’aide à la décision pour l’analyse d’ordonnances épaulée par de l’intelligence artificielle.

« Ce sont des systèmes complexes à mettre en œuvre et les pharmaciens, qui font essentiellement de l’analyse d’ordonnances, n’ont ni de formation sur la robotisation ni le temps pour cela. Ils ne peuvent devenir gestionnaire de projet comme on le ferait dans l’industrie ailleurs. Aussi faudrait-il des solutions clé en main ».

Imaginer l’avenir

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Dans la même logique, au regard des 28 réponses au questionnaire, la profession aurait aussi besoin d’une plus grande réactivité des industriels en cas de panne. Plus concrètement encore, sont attendus une simplification de la dé-blistérisation et un effort de recherche et de communication sur la conservation des médicaments en vrac (aujourd’hui raccourcie par rapport à celle dans le conditionnement initial).

Dans leurs rêves les plus fous, les pharmaciens imaginent « un seul robot hybride où il est possible de connecter des modules entre-deux et de les remplacer facilement même après plusieurs années (pas d’arrêts de commercialisation des pièces) », un robot « doté d’un système de détection automatique et fiable des doses non conformes ou de non-conformité de répartition dans le pilulier, sans nécessité de contrôle humain  », des « seuils de remplissage de l’automate (qui) évolueraient en temps réel en fonction des besoins de production »… Et un café avec ou sans lait ?

Naissance d’un consortium

La bonne nouvelle c’est que les industriels invités aux Journées du club en mars dernier ont fait le déplacement. Ils ont pu écouter les attentes exprimées des pharmaciens, désormais conscients de leurs principales contraintes, et amorcer un nouveau dialogue. Quelques mois après, la collégialité a porté ses fruits.

« Dans la suite de ces échanges, un consortium entre des industriels et les pharmaciens hospitaliers est en train de s’organiser au niveau européen pour se pencher sur l’interopérabilité, sur la transmission des informations et les formats d’échanges informatiques », se réjouit Etienne Cousein.

Travailler avec tout l’écosystème

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« C’est ce qui s’est passé en radiologie il y a 30 ans quand on est passé des films imprimés à des fichiers consultables sur écran ». La démarche est lancée. Il n’y a plus qu’à… travailler avec les fabricants de robots mais aussi tout l’écosystème du parcours du médicament (les éditeurs des dossiers patient électroniques, des logiciels de gestion des stocks…) !

« Cela dit, c’est aussi à nous, pharmaciens, d’un point de vue académique, de mieux définir nos process de fonctionnement, de les évaluer avec des données quantifiées », ajoute celui qui est également maitre de conférences associé et coordinateur de la chaire eLODI (sur l’e-logistique et la digitalisation thérapeutique en établissement de santé) à l’université de Lille. L’une des clés de l’accélération de l’automatisation sera, pour ces professionnels, de passer du stade de l’opinion à celui du discours objectivé, avec des indicateurs de performance identifiés comme pertinents.

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