Le CHU de Besançon réinjecte certains MNU dans le circuit

Le recrutement d’un seul agent au CHU de Besançon a permis de laisser dans le circuit quantité de médicaments revenus à la pharmacie, au lieu de les jeter. Résultat, 600 000 euros de traitements ne partent plus à la poubelle après un premier passage dans un service en 2019. La limitation du gaspillage a été réalisée grâce à une logistique simple reposant sur un sur-étiquetage, pour une traçabilité plus longue.

© Epictura

10 000 € de médicaments per os étaient, en moyenne, jetés chaque semaine en 2018 au CHU de Besançon. Telle était la conclusion d’une étude menée par un interne qui, pendant deux semaines, a analysé le profil des traitements jetés après leur renvoi à la pharmacie par les services.

75 % réutilisables

Damien Bichard

« Parmi les médicament non utilisés (MNU) mis à la poubelle, 22 % étaient périmés : il faut dire que nous jetions un produit quand sa date de péremption était inférieure à deux mois. 49 % étaient des médicaments en présentation unitaire pour lesquels nous avons toutes les informations nécessaires (la dénomination, le dosage, le lot, la date de péremption), sachant qu’ici nous dispensons aux services non pas à l’unité mais à la plaquette », détaille Damien Bichard, pharmacien praticien hospitalier, responsable de la dispensation et pharmacie clinique de l’établissement, où sont achetés quelque 100 millions d’euros de médicaments chaque année.

« Le reste se composait de 23 % de médicaments non unitaires et de 6 % de multidoses (flacons, tubes, crèmes, pommades, solutions buvables entamées) », poursuit-il. « Parmi les 23 % de non unitaires, seules 14 références coutaient plus de 1€ l’unité », ajoute-t-il pour montrer que le sur-étiquetage d’une petite quantité de produits (14 sur quelque 1600) pourrait générer des économies. En fait, 75 % des produits jetés étaient techniquement réutilisables.

Un investissement faible

Face à ce constat, ont été identifiés les médicaments en présentation non unitaire chers, et il a été évalué que le retraitement de ces produits pour les réinjecter dans le circuit était « coût-efficace » pour ceux au prix supérieur à 2 €. C’est sur cette base que le service a sollicité le recrutement d’un agent de pharmacie pour traiter les retours, et l’utilisation de la solution logicielle d’impression Eti Conform (solution gratuite qui nécessite seulement l’achat de planches d’étiquettes).

L’objectif : placer une étiquette avec les critères obligatoires (nom, posologie, lot, péremption) sur chaque plaquette. « C’est un outil très courant dans les petits et moyens centres mais méconnu dans les CHU », remarque le pharmacien, qui regrette que les informations obligatoires figurent uniquement sur un côté de la plaquette, lequel est souvent coupé dans les services…

Un nouveau circuit

© CHU Besançon

Depuis ces investissements, dès leur réception en pharmacie, les médicaments onéreux en présentation non unitaires sont identifiés et triés pour être sur-étiquetés avant rangement. Une opération qui bénéficie d’un double contrôle par un pharmacien. Au départ, en 2019, seuls les produits à plus de 40 € étaient ainsi traités. Aujourd’hui, le sont ceux à plus de 10 €. On descend l’élastique au fil du temps.

« En 2018, nous parvenions à réinjecter pour 1 à 1,2 M€ de médicaments. Avec le système de sur-étiquetage, nous sommes passés à 1,8 M€ en 2019 », se réjouit Damien Bichard. Ce sont ainsi 600 000 € de MNU recyclés, qui ne deviennent pas de déchets, ne polluent pas et sont économisés. « L’investissement financier demandé à l’hôpital est bien largement compensé », souligne le pharmacien.

Vers plus de proactivité

Reste que le COVID est passé par là et la pandémie a fait, pendant deux ans, plonger la quantité utilisée de médicaments majoritairement concernés par ce retraitement, comme les anticancéreux chroniques. Puis mi 2022, le changement du parc d’imprimantes a stoppé la pratique, les nouvelles machines s’étant révélées incompatibles avec le papier des étiquettes. Après ce raté dans les achats, c’est seulement début 2024 que la pharmacie a pu être à nouveau équipée d’une imprimante adaptée (environ 600€).

Désormais, le service compte multiplier les messages pour éviter que les plaquettes ne soient coupées (et donc les médicaments séparés de leurs mentions réglementaires de traçabilité) et veut baisser le niveau de prix des produits traités, jusqu’à atteindre les 2 €.

Mais surtout, « alors que jusqu’à maintenant ce sont les services qui nous renvoient les médicaments, désormais nous allons récupérer régulièrement et proactivement ces médicaments directement dans les armoires et chariots à pharmacie des unités de soins », explique Damien Bichard qui espère ainsi limiter les périmés.

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