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La maternité du CHU de Nice traque les antiseptiques

L’eau et le savon reviennent en force dans les protocoles de la maternité du CHU de Nice. Avec un objectif : utiliser le moins possible de produits nocifs pour l’environnement. La maternité, la pharmacie, le service d’hygiène et les achats ont travaillé main dans la main pour examiner les produits qui pouvaient être supprimés, ou remplacés.

© Epictura

Un grand ménage est en cours à la maternité du CHU de Nice. Les antiseptiques ont été supprimés dans six protocoles de soins. Exit dès que possible le Dakin, la Bétadine, la Biseptine… Ainsi l’eau et le savon sont désormais les seuls ingrédients admis pour le soin du cordon et la douche préopératoire. La ponction capillaire est même réalisée 100 % à l’H20 !

Une cartographie des produits

Déjà proactive sur le respect de l’environnement (il n’y a plus de barquettes plastiques mais des assiettes pour les repas, les nourettes sont recyclées, etc), la maternité a été choisie pour viser l’obtention du label Très haute qualité sanitaire sociale et environnemental (THQSE). Pour cette démarche, elle a été accompagnée par la société Primum Non Nocere, créatrice du label, ainsi que des représentants des services logistique et pharmacie.

Le processus de labélisation a démarré par une cartographie de produits. Concrètement, un groupe d’une dizaine de personnes autour d’une sage-femme référente a listé les cosmétiques, les produits d’entretien et les antiseptiques utilisés par le service. Des références que Primum Non Nocere a ensuite analysées une par une. Objectif : alerter sur leur éventuel impact environnemental et proposer des alternatives si besoin.

Supprimer, substituer et/ou réduire

Le groupe de travail

Pour en arriver-là, une équipe, où étaient représentés l’hygiène, la PUI, les achats, la maternité ainsi que l’agence, s’est posé trois questions successives pour chaque produit. La première : peut-on le supprimer ? Puis : peut-on le remplacer par un plus vertueux pour l’environnement et la santé de tous ? Enfin, on s’est interrogé sur l’impact d’un changement de produit sur les pratiques de soins (la révision des protocoles), notamment pour limiter les déchets.

En parallèle, l’équipe a mené une réflexion sur les produits utilisés lors des soins comme les compresses, les kits et leurs emballages… Pour chacun d’entre eux, les trois mêmes questions se sont posées. Peut-on supprimer, substituer ou réduire ? Une méthode qui a généré des surprises. Car personne ne fonctionne sur le même schéma.

« On s’est aperçu par exemple que toutes les sage-femmes ne suivaient pas le protocole de service pour les pansements de césariennes, des gestes pourtant simples techniquement », s’étonne Latifa Benamer, coordonnatrice en maïeutique au Pôle Mère Enfant du CHU de Nice, qui a eu par ailleurs le plaisir de constater que certaines professionnelles étaient déjà sensibilisées à l’éco-soin.

La question du soin du cordon

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Les autres ont parfois eu l’impression d’être passées du tout au rien. Un exemple : pour le soin du cordon, on utilisait jusque-là de la Biseptine et des compresses stériles dans cette maternité. Désormais, on se contente la plupart du temps de sécher la zone après le bain du bébé.

Après cette remise en question, huit protocoles ont été épurés : outre le soin du cordon, la douche préopératoire, l’ablation des agrafes, les tests urinaires, les ponctions capillaire et veineuse, la prise de sang et le sondage urinaire. « Tout cela a été discuté avec le service hygiène, les gynécologues etc. », rassure Latifa Benamer, dont le groupe de travail s’est appuyé sur les pratiques d’autres maternités ou de laboratoires d’analyses.

Prendre de nouvelles habitudes

« Et quand nous avons retiré un produit d’un protocole comme le Dakin pour les bandelettes urinaires, nous avons mené une étude sur un mois pour savoir si cela générait davantage de contaminations. On fait 150 bandelettes par jour, nous aurions vite constaté un souci s’il avait existé », observe-t-elle.

Ces nouveaux protocoles n’ont pas nécessité de formation mais plutôt du temps. « Il a fallu des informations affichées un peu partout pour que tout le monde procède de la même manière », confie Latifa Benamer. « Et nous n’avons pas tout mis en place du jour au lendemain ». D’ailleurs, certains produits sont encore bien ancrés dans les mœurs. A l’image du liniment. « On sent que les équipes ne sont pas prêtes à l’abandonner », observe Latifa Benamer qui n’a pas dit son dernier mot. Elle entend bien le supprimer des habitudes au plus vite. Déjà une autre référence plus vertueuse a été demandée à la pharmacie, et obtenue.

Passer à l’étape des achats revisités

Les nouvelles pratiques de la maternité, qui a décroché le niveau Or du label THQSE cette année, ont jusque-là surtout consisté à retirer des produits des protocoles. Aussi elles ont encore peu impacté les achats. Seul premier changement concret pour ce service : le savon bio proposé a été acheté pour remplacer celui qui comprenait des substances controversées. Compte-tenu du volume nécessaire, aucun appel d’offre n’a été mené.

« Cela ne durera qu’un an. Ensuite il va falloir mobiliser les achats pour travailler au long terme sur ces sujets », avertit Florent Bachelin, responsable de la cellule performance et référent pilotage développement durable au CHU de Nice. « Concernant les autres produits proposés, nous sommes en train de les chercher », poursuit celui qui a la mission d’impulser des réflexes « durables » au sein du service achats. L’écosoin n’a pas fini de révolutionner les habitudes.

 

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