Le CHU de Nîmes passe aux lames laryngologiques réutilisables

Le CHU de Nîmes s’apprête à ne plus utiliser les lames laryngologiques à usage unique après avoir mené une étude d’impact qui a démontré les avantages écologiques et économiques. Moins onéreuse à l’acte, la formule permettra aussi à l’hôpital de réduire son impact annuel de 26 tonnes équivalent carbone.

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Les lames de laryngoscope à usage unique vivent actuellement leurs dernières heures au bloc opératoire du CHU de Nîmes. La décision a été prise après deux ans d’une étude pour vérifier la pertinence du passage à l’usage multiple.

Plus de 17 000 lames par an

Pourtant, le CHU était bien parti pour organiser une filière de recyclage des lames jetables… « En fait, il s’agit d’un établissement à forte consommation avec environ 17 200 lames par an, pour chaque intubation sous anesthésie générale », contextualise Ninon Rouvière, pharmacien assistant plus particulièrement en charge de la stérilisation et des dispositifs médicaux stériles (DMS) et implantables (DMI).

Avant la pandémie, l’établissement avait commencé à mieux gérer ces DM en faisant en sorte qu’ils ne partent plus aux ordures ménagères, mais soient valorisés via la filière « métal » après une décontamination. Le covid-19 ayant freiné le déploiement de cette alternative, et dans le contexte d’un marché devant être renouvelé en 2022/2023, un groupe de travail associant acteurs du bloc opératoire, de la stérilisation et de la pharmacie, a étudié l’impact écologique et économique d’un passage aux lames réutilisables.

Projet validé par les équipes d’anesthésie et de stérilisation

« Et ce d’autant que ce sont des dispositifs peu complexes à absorber pour les services de stérilisation déjà sous tension », indique la jeune pharmacienne pour expliquer le contexte porteur, dans un établissement où on avait déjà utilisé des lames à usage multiples jusqu’en 2004.

Ninon Rouvière

Pour être en mesure de proposer un retour au réutilisable, le groupe de travail « développement durable au bloc opératoire » de l’établissement a d’abord dû faire valider le projet par l’équipe d’anesthésie et par le service de stérilisation. Une fois leur feu vert, il a également fallu, pour obtenir un accord de la direction, justifier les dépenses générées par le renouvellement de l’ensemble du parc en passant « d’une lame jetable à 2,35 € TTC à une pouvant coûter entre 35 € et 120 € TTC selon les fournisseurs », précise Ninon Rouvière.

1,54 kg d’équivalent CO2 par acte en moins

« Nous avons étudié notre consommation en usage unique sur les trois dernières années, et estimé en fonction la quantité de lames réutilisables nécessaire en prenant en compte différents paramètres : le nombre d’intubations par jour, le nombre de salles, le délai de restitution par le service de stérilisation (fixé à 24h grâce à la proximité du service par rapport au bloc) ».

Avec ces chiffres validés, deux études ont été menées de front : l’une écologique, l’autre économique. D’un côté, le CHU a travaillé avec l’agence de coaching en développement durable Primum Non Nocere. Cette dernière a procédé à l’analyse du cycle de vie des deux types de lames, à usage unique ou réutilisables 4000 fois. Le verdict fut clair : « L’usage multiple permet d’éviter 1,54 kg d’équivalent CO2 par acte, soit plus de 26 tonnes par an à l’échelle de notre CHU. Et c’est ce que montre également d’autres d’études qui concluent la plupart du temps à l’usage unique plus polluant », précise la pharmacienne.

Un acte moins coûteux

Concernant l’analyse économique, elle a croisé des chiffres aussi variés que le prix d’achat, des coûts de retraitement par le service de stérilisation, les coûts de logistique (commande, stockage) et les coûts de traitement des déchets. Bilan : « le réutilisable diminuerait le coût d’une intubation de 0,35 € par acte au sein de notre établissement », confie Ninon Rouvière. Reste qu’on ne peut extrapoler ce verdict économique à tous : le prix d’achat peut varier d’un établissement à l’autre, comme celui de la logistique, du traitement des déchets etc.

Près de deux ans après le début du questionnement sur le changement de pratique, l’appel d’offres a été publié en demandant des lames réutilisables. Une période d’essai a été réalisée par les anesthésistes afin que ces derniers puissent se mettre d’accord sur un fournisseur. La logistique devrait être prête pour gérer le flux de ces nouveaux produits entre les différentes salles de bloc et le service de stérilisation en ce mois de mars. Le bloc opératoire du CHU de Nîmes pourra alors abandonner les lames à usage unique.

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