Le Crous de Nantes réduit encore le gâchis alimentaire

Alors que le Crous de Nantes Pays de la Loire (15 restaurants) collecte ses biodéchets depuis des années, la structure a mis en place un système de suivi des aliments consommables jetés. Cela passe par des pesées ponctuelles pour mesurer les quantités, sensibiliser en salle et en cuisine, et adapter les pratiques en conséquence. L’organisme récolte les fruits des efforts accomplis : le reste dans l’assiette est tombé à 25 grammes en 2022.

© Crous Nantes

Placer le pain et les légumes d’un côté, les peaux de fruits, les os de poulet et les arrêtes de poisson de l’autre… Du 6 au 10 février dernier, rendre son plateau au Resto U’ Ricordeau à Nantes, prenait un peu plus de temps que d’habitude. Sur les tables, une affichette indiquait la méthode à suivre pour trier ses déchets avant de se lever pour déposer son plateau.

Une méthode reproductible

En fait, il s’agissait d’une des initiatives du Crous de Nantes Pays de la Loire, qui compte 15 restaurants (15 000 repas/jour), menée dans le cadre d’une analyse globale des déchets, impulsée par Marion Redureau, responsable du service développement durable et référente RSE, un poste créé dès 2019. Cette dernière a, pour l’occasion, été épaulée par le bureau d’études Inddigo en 2021 et 2022, pour un budget de 20 k€, dont 70 % financés par l’Ademe.

Alex Thibaud

Si Marion Redureau avait en tête de peser les biodéchets avant cette étude, Inddigo a pu l’assister sur la méthode à mettre en place. « Nous avons ciblé quelques sites à Nantes, Angers, Le Mans et Saint-Nazaire dans le but d’établir une trame de diagnostic que Marion Redureau pourrait reproduire ailleurs », explique le consultant Alex Thibaud, qui a pu analyser les factures des prestataires de collectes. Concernant les biodéchets, la méthode consiste aussi à comprendre si ces derniers sont tous gérés par la filière dédiée, si leur traçabilité est bien établie, à s’assurer que le personnel comme les usagers reçoivent des consignes cohérentes…

Préparer son plateau avant de se lever

À l’issue du diagnostic, un système de pesée a été mis en place pour connaitre les quantités de biodéchets consommables générés – en d’autres termes le gaspillage. Fin 2022, le Crous avait déjà mené une semaine de pesée dans sept établissements, en variant les sites et les saisons. À chaque fois, trois principaux bacs étaient proposés aux étudiants : deux pour les déchets alimentaires consommables ou pas, et un pour l’emballage. Un autre bac est ajouté pour les serviettes, lorsque les collecteurs compostent.

Marion Redureau

Ces jours-là, Marion Redureau, des membres du personnel – parfois un directeur, parfois un agent de cuisine…-, des étudiants référents au Crous, ou encore des membres de l’association Solidarifood veillaient au grain aux côtés des usagers pour vérifier que ce tri atypique était réalisé correctement. « Les affichettes sur les tables ont permis d’encourager les usagers à préparer leur plateau avant de se lever et ainsi d’éviter un trop grand ralentissement du flux de sortie », détaille Alexandre Héligon, chargé de communication dont le service est impliqué sur le sujet.

25 grammes de gaspillage, qui dit mieux ?

Ces campagnes de pesées, qui doivent in fine aider à répondre à l’obligation de réduire le gaspillage alimentaire depuis les lois Garot (2015) puis Egalim (2019), sont aussi l’opportunité de sensibiliser aux bons gestes. « À cette occasion, on demande aux usagers pourquoi ils laissent de la nourriture », précise Marion Redureau, qui tient à faire savoir que le traitement du déchet alimentaire diminue d’un tiers la poubelle d’ordures résiduelles. « Les agents le constatent », ajoute-t-elle pour montrer que la sensibilisation passe aussi par des faits.

De plus, après chaque pesée, le grammage moyen constaté est communiqué sur place. Résultat, « en salle, le gaspillage était en 2022 de seulement 25 g par assiette quand la moyenne nationale, selon des chiffres de 2018 de l’Ademe, est de 120 g en restauration collective », se félicite Marion Redureau. « J’ai maintenant la certitude que le fait d’avoir intégré le tri des bio déchets par l’usager, depuis 2015 dans certains sites, est très efficace », poursuit-elle dans un contexte où la chasse au gaspi est devenue un fait de société.

Elle récolte également les fruits de son implication dans la démarche collective « Mon Restau Responsable », pour laquelle un groupe de travail avait planché sur les écogestes en matière de gaspillage. Cette démarche avait débouché, avant même l’intervention d’Inddigo, sur un guide pratique conçu comme un outil clé en main afin que les restaurants puissent réaliser des pesées.

Registre des déchets à l’automne

Concernant les achats, Inddigo a anticipé. « Comme le coût de prestations a tendance, en général, à augmenter et que cette prestation en particulier monte en puissance, nous avons réalisé une note de cadrage pour un cahier des charges », précise Alex Thibaud. De quoi être armé pour un marché qui pourrait être régional.

Dans la foulée de l’audit et des recommandations, 2023 devrait voir la création d’un « registre des déchets en septembre, puis d’un indicateur de pesée annuel dans chaque site de restauration. Avant cela, au printemps, nous allons réunir les chefs de cuisine dans le but de trouver des solutions pour diminuer ce gaspillage. Des actions pourront être déployées comme la suppression des aliments décoratifs ; la sensibilisation au gaspillage des usagers dès l’entrée du restaurant car l’argument souvent évoqué est que les étudiants n’ont plus faim (côté salle) ; les demi-bacs en fin de service (côté cuisine) », ajoute Marion Redureau. Parce que le meilleur déchet reste celui qui n’existe pas.

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