La filière DASRI face à la transition écologique

A l’occasion de Santexpo, Youssef Ernez, DG de Proserve DASRI, a fait plusieurs propositions pour gérer les déchets à risque infectieux de façon plus responsable, tout en maintenant la sécurité sanitaire. Il a ainsi plaidé en faveur d’un essor des capacités de banalisation, solution qui ouvre la voie au recyclage des matières et à l’économie circulaire. Le professionnel a aussi incité les pouvoirs publics à réfléchir à la réutilisation des contenants, pratique autorisée dans d’autres pays de l’Union.

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« La filière des DASRI a été bousculée par la crise Covid ». Lors d’un atelier au dernier SantExpo, Youssef Ernez, DG de Proserve Dasri, a rappelé le choc provoqué par la pandémie dans son secteur d’activité. Sa société a, dans certains cas, multiplié par 5 la fréquence de collecte. Elle a parfois récupéré 30 % de volume supplémentaire et doublé le kilométrage parcouru par rapport à d’habitude. Une suractivité provoquée par l’augmentation des actes de soins et l’utilisation massive des EPI. Mais la Covid a aussi mis en exergue les problèmes structurels d’un circuit jusque-là « invisible ».

8 propositions dans un livre blanc

C’est pourquoi le patron de Proserve estime essentiel de réfléchir à l’avenir de la filière. Et ce même si la situation est revenue à la normale. Afin de nourrir le débat public, alors que la DGOS a annoncé l’actualisation de son guide datant de 2009, Proserve a récemment publié un livre blanc contenant 8 propositions regroupées autour de trois axes : la sécurité sanitaire, la simplification du cadre réglementaire pour faciliter le quotidien des équipes soignantes, et la transition écologique.

Pierre Parneix

Dans ce domaine, les DASRI sont un « petit sujet par rapport aux médicaments et aux DM », a recadré Pierre Parneix : à peine 5 % des 8 % des émissions des GES du secteur de la santé. « Cela ne veut pas dire qu’il ne faut pas s’en préoccuper », a enchaîné le président de la Société française d’hygiène hospitalière (SF2H). D’autant que « tous les professionnels de santé sont très enthousiastes et demandeurs de participer à la démarche développement durable » et que les enjeux de sécurité et d’environnement « sont tout à fait compatibles ».

Facture au nombre de contenants

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L’enjeu économique aussi. Proserve propose ainsi à ses clients une facturation basée au nombre de contenants collectés et non plus à la tonne. « L’établissement va mieux remplir ses bacs. Cela prend moins de place dans le camion et on optimise les tournées », a expliqué Youssef Ernez. Des bacs remplis à 80 % au lieu de 50 % changent complètement la donne. Avec des passages moins fréquents, le volume de GES est moindre. Et la dépense de l’hôpital allégée. « Ce nouveau système permet de gagner jusqu’à 15/20 % de la facture », assure-t-il.

Le livre blanc de Proserve contient plusieurs préconisations pour une gestion plus responsable des DASRI. D’abord développer les capacités de banalisation, technique qui transforme les déchets infectieux en déchets standard. Aujourd’hui,  80 % des DASRI sont incinérés, seuls 20 % banalisés. Difficile d’imaginer une démultiplication des sites d’incinération des années à venir. Les collectivités ne vont pas investir, alors que les DASRI représentent tout au plus 2 à 3 % des déchets à traiter. De surcroît, les populations voient d’un très mauvais œil tout projet d’installation nouvelle.

Plaidoyer en faveur de la banalisation

Youssef Ernez

Si l’on veut traiter plus de déchets, il faut donc « pousser » la banalisation, défend Youssef Ernez, dont la société ambitionne de banaliser 30 % de sa collecte dans les 2 ou 3 prochaines années (contre 10 % actuellement) et de parvenir à 50 %. Sur des sites dédiés ou in situ, lorsque le volume de l’établissement s’y prête (250 tonnes par an selon la fiche de l’ANAP « Élimination des DASRI par banalisation, prenez la bonne décision »).

L’avantage de la technique, c’est qu’elle ouvre la voie à l’économie circulaire et à la valorisation des matières.  « Avec la banalisation, on peut récupérer du plastique qui servira à recréer des fûts », a illustré Youssef Ernez. Ce dernier plaide aussi en faveur du tri et de la récupération des pièces métalliques comme l’inox ou le titane qui partent aujourd’hui en fumée… De quoi permettre aussi de baisser de 10 % le volume de DASRI à traiter.

Autoriser la réutilisation des fûts

Le DG de Proserve incite enfin les pouvoirs publics à étudier la possibilité de réutilisation des contenants, à l’image de ce qui se pratique en Italie ou en Espagne (jusqu’à 10 fois après désinfection). Aujourd’hui, la réglementation française (arrêté du 24 novembre 2003 relatif aux emballages des DASRI) impose des fûts à usage unique. Lesquels finissent ensuite en cendres. Ce seul changement permettrait évidemment de réduire l’empreinte carbone, mais aussi « 90 % de la facture des achats de ces fûts », promet Youssef Ernez.

 

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