La logistique hospitalière doit afficher sa valeur ajoutée

La crise Covid a permis à l’ensemble des acteurs du système de santé de prendre conscience de la place éminemment importante de la logistique. Mais pour exister pleinement, les métiers du soutien doivent maintenant s’attacher, non seulement à améliorer leur offre, mais aussi à mesurer la valeur du service rendu, ont insisté plusieurs experts qui intervenaient le 2 juin lors des 34e journées d’études de l’Association des responsables des transports et de la logistique à l’hôpital (ARTLH).

La pandémie a quand même eu un effet positif. Celle de mettre en lumière l’importance des fonctions soutien. « Sans la logistique, rien n’est possible », a résumé Fabienne Billault, présidente de l’ARTLH, en ouvrant les 34e journées d’études de son association le 2 juin à La Rochelle. « On a parlé de nous dans la presse, même à la télé. Tout le monde nous a découverts, nous les « invisibles », on a même dit que nous étions des héros. On a salué notre disponibilité et notre réactivité. Enfin ! », a-t-elle rappelé. « Car depuis longtemps, nos services travaillent en toute discrétion en contribuant à la qualité du parcours patient », a enchaîné la présidente.

Améliorer encore l’offre de services

Fabienne Billault, présidente de l’ARTLH

Exemple parmi tant d’autres de ce soutien quotidien, la blanchisserie du GCS Charente Maritime Nord traite 10 tonnes de linge par jour. Iso 9001 depuis 2020, elle respecte une démarche qualité continue et cherche sans cesse à s’améliorer. Afin de réduire le nombre de livraisons effectuées au mauvais endroits, elle a mis en place un système de traçabilité. Des puces RFID ont été installées sur 90 contenants. Dorénavant, le GCS dispose de l’horodatage du chargement et du dépôt du linge. Et le système alerte aussi immédiatement le chauffeur s’il s’est trompé de destination.

De plus en plus professionnelle, la logistique hospitalière a toutefois toujours du grain à moudre. « Il y a encore des marches à franchir pour favoriser le travail des uns et des autres », a résumé Thierry Montourcy, DGA du GH La Rochelle-Ré-Aunis, convaincu que la logistique aura « une place de plus en plus prépondérante », avec une offre de services capable de recentrer les soignants sur leur cœur de métier. Multiplicité des acteurs, maturité différente des processus au sein d’un même établissement, répartition des rôles à géométrie variable entre les fonctions soutien et les unités de soin… Pierre-Olivier Bard, directeur du pôle conseil chez Novorga, a montré l’étendue des marges de progrès, par exemple grâce au caractère plus transversal de l’ordonnancement et de la régulation des tâches.

Se débarrasser de la vision d’une logistique centre de coûts

Pour autant, le discours d’introduction de la présidente de l’ARTLH a mis le doigt sur un sujet d’importance, celui de la valeur ajoutée réelle et perçue de la logistique. « Même quand nous rendons du temps aux soignants, nous restons dans l’ombre », a témoigné une professionnelle d’un CHU. Il est important d’appréhender la valeur de l’offre des métiers de soutien pour les faire exister, a souligné Jean-François Mercury, directeur de projets chez Resah Conseil : « cela est naturel pour un GCS puisqu’il facture ses prestations à ses adhérents. Cela l’est beaucoup moins pour les services en interne. »

Objectif : se débarrasser d’une vision de la logistique centre de coûts au profit d’une logistique génératrice de gains. Et convaincre les DG d’investir dans le domaine, tant côté matériel innovant que des ressources humaines. « Il s’agit aussi de sensibiliser les directions générales pour parvenir à intégrer la logistique dans le projet d’établissement », a pointé Romain Thorel, chef de projet senior logistique chez Resah Conseil.

Mesurer la valeur apportée

Jamel Mahcer

Avant de communiquer sur la qualité du service rendu et la valeur apportée, il faut les mesurer. Manager du pôle logistique à l’ANAP, Jamel Mahcer a incité les logisticiens hospitalier à se professionnaliser en la matière, avec la mise en place de contrats de service, associés à des indicateurs. Les outils sont connus aussi bien pour l’activité que pour la performance : taux de commandes satisfaites, taux de service ( % de livraisons correctes arrivées au moment prévu), taux de disponibilité des produits en stock, taux de retour des produits livrés (erreur, produit défectueux…), coût des livraisons, valeur des stocks…

Disposant d’un centre décisionnel unique, l’hôpital canadien de Toronto va encore plus loin, puisqu’il est capable de sortir d’autres données chiffrées suite à l’optimisation de la logistique, comme le temps économisé pour prendre en charge un patient en ambulance ou le transférer d’un service à un autre, jusqu’au nombre de lits gagnés. Jamel Mahcer a exhorté les professionnels présents à La Rochelle à s’emparer du sujet sans tarder, alors que la pandémie a provoqué une prise de conscience des établissements. « C’est le bon moment. Il faut surfer sur la vague post-Covid ».

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