Radiographie post Covid des achats

Le Conseil national des achats (CNA) et l’agence Agile Buyer ont interrogé 778 acheteurs entre le 11 et le 15 mai pour avoir une vision objectivée des conséquences de l’épidémie sur leur métier. Plus d’un tiers d’entre eux craignent des faillites de prestataires stratégiques. Et un quart estime que la crise va favoriser la relocalisation des fournisseurs.

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Chacun en est conscient, la fonction achats a été projetée sur le devant de la scène durant l’épidémie.  « Elle a montré toute sa valeur ajoutée en situation de crise », a commenté Marc Sauvage, DGA chargé des achats, de la commande publique, du juridique et de la transformation numérique à la région Ile-de-France, le 11 juin à l’occasion du webinaire pour présenter les résultats d’un questionnaire en ligne, administré mi-mai.
L’ampleur de la crise sanitaire a en effet poussé le CNA et l’agence Agile Buyer, qui publient en début d’année une étude sur les tendances et les priorités dans les achats, à effectuer une enquête complémentaire.


Crainte de faillites chez les fournisseurs stratégiques

 

Quels sont les principaux enseignements ? 58 % des acheteurs interrogés ont connu ou craignent des difficultés de livraison de la part de leurs fournisseurs « stratégiques », en raison du redémarrage progressif de l’activité économique. Avec l’arrêt ou le ralentissement des chantiers de construction ou d’agrandissement de lycées, la région Ile-de-France va par exemple acheter des bâtiments modulaires pour assurer la rentrée dans les établissements de son territoire.

37 % des professionnels sondés craignent même des faillites, toujours pour leurs fournisseurs « stratégiques ». 54 % d’entre eux affirment ne pas disposer, ou de manière insuffisante, d’outils pour comprendre réellement la fiabilité financière de leurs prestataires. « Ces outils existent, a réagi Marc Sauvage, mais l’actualisation des données n’est pas instantanée. »


La question de la localisation

 

Les difficultés d’approvisionnement déclenchés par le Covid-19 ont changé la donne et mis l’accent sur la concentration de fournisseurs dans certains pays.  25 % des personnes interrogées estime que la crise va pousser à la relocalisation (majoritairement en France et en Europe). « Il faut réfléchir à acheter autrement », concède Marc Sauvage qui préfère au terme de « relocalisation » plutôt une « bonne localisation » en déterminant les risques, en recherchant une plus grande souveraineté et en étant plus solidaire.

La crise a également accentué le rôle des directions achats dans le pilotage des délais de paiement pour 40 % de l’échantillon (+6 % par rapport à l’enquête publiée en janvier). Elle a développé une « culture nouvelle » et modifié le rapport au risque et au paiement dans le secteur public, peu habitué par exemple au réglement anticipé, a observé Jean Bouverot, chef du service de l’achat, de l’innovation et de la logistique du ministère de l’Intérieur (SAILMI) qui retient également la forte « demande de visibilité » : « dans la perspective d’une autre crise, je vais travailler avec mes équipes sur l’information délivrée à nos clients internes ».

Président du CNA et directeur des achats du groupe Eiffage, Jean-Luc Baras estime que la profession va être attendue pour participer à la reconstruction et, plus largement, à la gestion globale des organisations : « on va avoir besoin de nous, de nos idées, pour transformer ce qu’il y a à transformer. »

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