Paul Gouhier (Resah)  : l’achat informatique, levier majeur de réduction de l’impact environnemental

Le 12 avril se tiendra à Arras la toute première étape régionale d’une tournée nationale que le Resah a conçue à l’attention des directeurs des services informatiques des établissements de santé et des collectivités territoriales. L’occasion pour Paul Gouhier, directeur du pôle achats systèmes d’information au sein du GIP, de rappeler l’importance névralgique de ce champ dans la commande publique.

achat-logistique.info : La 1ère édition des journées régionales lancée par le Resah est dédiée aux enjeux de la transformation numérique. En quoi ce champ est-il effectivement stratégique pour les structures hospitalières ou territoriales ?

Paul Gouhier : « Les charges déportées sur le numérique sont chaque année plus nombreuses, que ce soit en interne, pour optimiser l’organisation, faciliter le travail des agents, ou au bénéfice des usagers, pour ici améliorer la qualité de la prise en charge, là le service rendu. D’ailleurs, en bloquant de manière quasi-totale l’activité jusqu’à même mettre en péril ses missions premières, notamment à l’hôpital, les cyberattaques écrivent bien, en creux, ce rôle pivot qui est désormais celui des technologies de l’information (IT). »

achat-logistique.info : Alors, justement, quelles difficultés particulières ce segment d’achat présente-t-il pour les professionnels ?

Paul Gouhier : « Pour le DSI comme l’acheteur, les difficultés sont effectivement multiples. D’abord, il y a la dépendance à des technologies et des process qui ne sont pas maîtrisés en Europe. Cette situation génère une exposition majeure aux contingences – sanitaires, économiques ou militaires -avec, ainsi que nous le vivons, le risque d’augmentations tarifaires incontrôlables sur les composants, de délais extensibles, voire de ruptures d’approvisionnement comme pour les switchs.

Du côté des solutions, le sujet est tout aussi sensible avec une configuration qui interroge cette fois l’hébergement des datas, leur traitement et plus globalement, la souveraineté de la donnée. Déjà évoquée plus haut, la cybersécurité constitue par ailleurs un autre élément crucial, les organisations publiques constituant des cibles privilégiées, tant au regard de leurs missions décisives que de leurs infrastructures encore faillibles.

Enfin, la question de l’impact des IT sur l’environnement fait peser sur le secteur la responsabilité d’achats sachant aujourd’hui concilier déploiement numérique et impératif écologique. »

achat-logistique.info : Parmi les sujets inscrits au programme des journées régionales organisées par le Resah s’affiche précisément cette thématique d’un numérique plus responsable. De quelle manière les achats informatiques et numériques impactent-ils donc l’empreinte environnementale d’une structure ?

© Epictura

Paul Gouhier : « Pour un établissement de santé, comme pour une collectivité dont le poste de terminaux mobiles (tablettes, PC, portables…) à destination des élèves explose de manière exponentielle chaque année, l’empreinte est en effet très significative. Pour exemple, les systèmes d’information hospitaliers sont déjà responsables de plus de 5 % du bilan carbone total d’un CHU.

Or, on peut estimer qu’avec l’accroissement des solutions connectées comme de la 5G, ce chiffre va forcément augmenter dans les années qui viennent si on ne modifie pas certaines de nos habitudes, dans nos pratiques quotidiennes mais aussi dans nos achats. Et cela vaut évidemment aussi pour les collectivités territoriales. Aussi les uns et les autres doivent-ils désormais considérer l’achat informatique comme un levier essentiel de réduction de leur impact environnemental et se saisir dès maintenant de cette question. Le Resah va d’ailleurs publier bientôt un guide sur cette question. »

achat-logistique.info : Sur quelles étapes majeures DSI et acheteurs peuvent-ils ainsi intervenir ?

Paul Gouhier : « En amont, en challengeant la supply chain – qu’est-ce que j’achète (écoconception, matériels reconditionnés, packs locatifs…) pourquoi et où – et en aval, en optimisant la logistique des commandes. Au travers de clauses spécifiques ou de l’ingénierie contractuelle (notamment sur la décomposition des prix), prescripteurs et acheteurs peuvent en effet impulser des changements salutaires dans les habitudes de commandes des pouvoirs adjudicateurs, par exemple en jouant sur des tarifs de livraison dégressifs en fonction du volume de commande et/ou du mode de transport. »

achat-logistique.info : C’est donc un segment sur lequel le binôme DSI/acheteur est absolument fondamental ?…

Paul Gouhier : « Quel que soit l’acte d’achat, la relation prescripteur – acheteur est toujours primordiale afin de corréler le besoin à un regard extérieur qui l’objective, le rationalise et même parfois, le modernise. Mais il est vrai que compte tenu des conséquences hautement stratégiques, voire critiques, que l’achat informatique et numérique emporte pour toute l’organisation, la qualité du dialogue entre les deux acteurs s’avère ici spécialement essentielle. »

achat-logistique.info : Dès lors, en quoi l’expertise d’une centrale d’achat s’avère-t-elle particulièrement utile ?

Paul Gouhier : « On l’a vu tout au long de cet entretien, ce secteur est particulièrement complexe, à la fois par sa configuration, la façon dont il retentit sur l’ensemble de l’organisation et sa criticité. Grâce aux experts métiers qui la composent, des acheteurs dédiés qui maîtrisent parfaitement le domaine et ses évolutions, une centrale d’achat va donc déjà assurer à ses adhérents les marchés les plus performants.

Par une massification de la demande, elle s’avère aussi, bien sûr, le vecteur de gains économiques non négligeables. Mais enfin et surtout, une centrale d’achat saura se faire à la fois le porte-voix et le contrepoids dont ses adhérents ont besoin face aux majors internationaux qui représentent la majorité des fournisseurs sur ce champ. En clair l’assurance de voir toujours son besoin priorisé. »

Pour en savoir plus sur les journées régionales du Resah

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