Les multiples défis de la fonction achat hospitalière

Quel est le sentiment des directions achats hospitalières face aux multiples défis à relever, de l’augmentation des prix à la sécurisation des approvisionnements, en passant par la prise en compte du développement durable ou la cybersécurité ? Pour en savoir plus, une équipe d’élèves-directeurs de l’EHESP a mené l’enquête, dont les résultats ont été présentés le 8 décembre lors des journées de l’achat hospitalier.

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Comme l’année dernière, une équipe d’élèves-directeurs de l’EHESP (composée d’Arnaud Gillois, de Cannelle Legallais et d’Alix Le Grill, promotion 2022-2023) a radioscopé la fonction achat hospitalière, à la demande du Resah. Cette fois pas question de dessiner le portrait-robot du métier dans dix ans (lire notre article du 2 décembre 2021). Mais plutôt d’en savoir plus sur les défis que les établissements doivent affronter, entre autres l’organisation et la performance de la fonction achat-logistique, la maîtrise des coûts et de l’inflation, la sécurisation des approvisionnements, la RSE, ou encore la cybersécurité, sujet particulièrement d’actualité.

Le trio a donc mené l’enquête en posant 58 questions à 25 directeurs achats ou leurs représentants dont une large majorité (17) d’établissements support de GHT. Des entretiens semi directifs avec 10 directeurs et responsables achats ont complété le dispositif. Personne ne sera surpris : chercher à juguler les effets de l’inflation est une préoccupation, spécialement en ce qui concerne la restauration. Certains établissements tentent de faire des économies en modifiant leurs pratiques, par exemple en augmentant les menus végétariens.

Elargir son panel fournisseur

La recherche de nouveaux fournisseurs alternatifs figure au rang des solutions. 34,8 % des répondants ont élargi leur panel, en particulier dans les domaines de l’alimentation, des produits hôteliers, du numérique et des travaux. L’énergie est aussi un casse-tête. 61 % des directeurs éprouvent le besoin d’être accompagné pour l’achat et la prévision des dépenses pour ces marchés.

Mais comme le synthétise un responsable des achats d’un GHT des Hauts de France : « on est moins dans une recherche d’économie que de sécurisation des approvisionnements », autre challenge d’envergure. 21 % des répondants déclarent que la moitié de leurs achats sont actuellement soumis à des risques dans ce domaine. Là encore, les directions achats choisissent de ne pas mettre leurs œufs dans le même panier. Parmi les méthodes jugées les plus efficaces, la diversification des prestataires arrive en tête (79 %), devant l’optimisation de la relation fournisseur (58 %), la rédaction des clauses juridiques (42 %), l’approvisionnement local (29 %) et le recours aux offres des centrales d’achat (21 %).

La question des achats responsables

À l’affiche de nombreux colloques et webinaires, l’achat responsable semble surtout décliné dans le secteur alimentaire (58 %), sans doute en raison de loi Egalim et de l’obligation de faire des choix, en raison de la conjoncture compliquée. Malgré ses contraintes (notamment la capacité à répondre aux volumes), le circuit court a le vent en poupe. 87 % du panel le plébiscite.

Les autres projets concernent surtout l’impact environnemental, via la réduction des déchets et des consommations. Le volet social reste encore un parent pauvre. Et pour expliquer le faible niveau de développement d’une démarche RSE pluridimensionnelle, 70 % des personnes interrogées mettent en avant le manque de compétences. Le résultat le plus frappant est le dénuement du suivi des actions : aucun indicateur relatif à la dimension RSE des achats n’est disponible chez 79,2 % des répondants.

Les attaques régulières contre les établissements de santé poussent les directions achats à s’organiser. 87 % des professionnels interrogés évaluent leurs acquisitions sous l’angle de la cybersécurité, notamment par la mise en œuvre de clauses spécifiques ou de recours aux offres des centrales.

Poursuivre la mutualisation des achats

Afin de fiabiliser son circuit d’approvisionnement, bénéficier de l’aide d’experts, obtenir de meilleurs prix, la mutualisation territoriale est évidemment une solution. Mais, à en croire l’enquête, il y a encore du pain sur la planche. Près de 70 % des répondants estiment que la démarche GHT, entamée officiellement depuis 2018, reste inachevée. Il faudra même attendre la fin 2025, selon la moitié du panel, pour parvenir à la mener à bien.

La fonction achat mutualisée cherche d’ailleurs encore à s’étoffer. Près de 60 % des professionnels prévoient des recrutements dans les 6 prochains mois. Parmi les profils prioritaires, l’acheteur apparaît toujours dans 42 % des cas, devant le contrôleur de gestion achat, cité par 25 % de l’échantillon. Près de la moitié des professionnels interrogés n’ont d’ailleurs pas mis en place de contrôle de gestion des achats.

À l’image des ressources humaines, les outils font parfois défaut. Seuls 48 % déclarent bénéficier d’un SI achat opérationnel. Sont pointés du doigt l’absence de fonctionnalités dans les solutions proposées ou le coût d’acquisition, spécialement pour les GHT de petite et moyenne taille. Les praticiens insistent surtout sur la nécessité d’une meilleure coordination entre établissements supports et parties, étape préalable indispensable avant le déploiement bénéfique d’un outil informatique achat commun.

 

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