Cyril Martin : « L’éco-responsabilité, ce ne sera pas que de l’affichage ! »

Pour le directeur des achats et de la logistique du CHRU de Brest, les achats ont un rôle stratégique à jouer dans la sobriété énergétique et l’éco-responsabilité à développer. Par le volontarisme dans l’accompagnement des autres services et par la montée en puissance du critère RSE dans ses appels d’offres. Cyril Martin annonce ainsi que l’hôpital brestois ira désormais le plus souvent possible jusqu’à une pondération de 35%, en fonction des contrats et de la maturité des fournisseurs.

achat-logistique.info : Le CHRU de Brest vient de présenter un plan de sobriété énergétique et d’éco-responsabilité (lire notre article du 16 décembre 2022). Dans cette démarche, les changements de comportements interne ne comptent-ils pas plus que ce que peut faire votre service ?

Cyril Martin : « Ils jouent forcément un rôle. Il y a une nouvelle culture acquérir et à approfondir et des domaines où les comportements sont la clé. Pour les médicaments la prescription est le levier principal parce que les circuits courts, en la matière, on ne va pas les trouver comme ça. C’est aussi vrai pour les dispositifs médicaux mais ils peuvent devenir plus réutilisables.

Dans tous les cas, nous allons travailler avec nos collègues prescripteurs pour voir comment améliorer les choses. Les médecins du CHRU s’interrogent sur leurs pratiques dans d’autres domaines encore comme les données de santé et même sur l’utilisation de certains gaz anesthésiques dont le bilan carbone est vraiment mauvais. Notre rôle est de les informer de ce qui existe sur le marché pour aller dans le bon sens. »

achat-logistique.info : « C’est là où, comme vous l’avez énoncé lors de la présentation de ce plan, votre rôle est stratégique ?

Cyril Martin : « Pas seulement. Certains choix, dans nos 240 millions d’€ annuels d’achats, hors travaux, ne dépendent que de nous et doivent évoluer. Parfois c’est déjà en œuvre. Le principe de réutilisation systématique du mobilier hospitalier est bien ancré. Nous avons constitué des réserves qui servent régulièrement pour de petits projets et même pour de plus gros. Le nouveau bâtiment de cancérologie où est transféré une unité du centre-ville et qui ouvre fin 2023 sera en grande partie équipé de cette façon.

Dans d’autres domaines, nous débutons. Pour renouveler notre parc automobile d’environ 200 véhicules, nous adhérions, pour les véhicules légers, à des marchés nationaux, nous avons commencé à mener des consultations en propre pour acheter localement des véhicules d’occasion, électriques ou hybrides. La cuisine vient d’essayer un camion électrique. Le marché de transports de produits de santé vient d’être passé avec une entreprise qui n’utilise que des véhicules électriques ou au bioéthanol pour les plus longs trajets dans le GHT. Nous espérons ainsi effacer complétement l’empreinte carbone de nos déplacements entre sites.

Dans l’alimentaire, dans la gestion des déchets, nous avons en cours des réorientations complètes dans des produits locaux, du traitement en interne en réactivant une légumerie, en pratiquant le tri des déchets à la source, en les valorisant. »

achat-logistique.info : Tout ceci passe-t-il par des critères RSE plus importants dans vos appels d’offres ?

Cyril Martin : « Oui, c’est une « petite révolution » et ce ne sera pas que de l’affichage. Nos acheteurs ont été formés en 2022 pour le mettre en œuvre, le critère RSE va départager les offres. Nous attribuons désormais nos marchés aux offres économiquement et écologiquement les plus avantageuses. Cela passe effectivement par une augmentation de la pondération des critères RSE.

Jusqu’ici, c’était symbolique, ils représentaient en général 5 % de la note. Nous irons désormais le plus souvent possible jusqu’à 35 %. C’est un peu une sorte de maximum que nous nous donnons. Cela dépendra évidemment de la maturité de nos fournisseurs en la matière, de leur capacité à y répondre.

Nous sommes allés jusqu’à 20 % (40 % pour le prix, 40 % pour la valeur technique) dans notre dernier marché de production d’imprimés. A l’occasion du renouvellement du marché des cafétérias, la RSE, c’est 35 % dans la note technique comptant pour 60 %, le reste de la note, 40 %, étant attribué pour le prix mais qui comporte des sous-critères inférieurs à 35 %. La RSE est devenu ainsi le critère le plus important pour ce marché.

Evidemment, nous ne pourrons pas aller aussi loin pour tous nos contrats. Certains, comme dans l’alimentaire, sont plus faciles à traiter de cette façon : les produits locaux, la préparation locale, la diminution de la quantité de viande… Concernant nos marchés de travaux, nous agissions jusqu’ici en matière de RSE par le biais de clauses d’insertion. Nous allons encore travailler la question. Là aussi, ce ne sera pas que de l’affichage.

Encore une fois, toutes nos équipes ont été formées. Elles ont les outils qu’il faut, elles connaissent les marchés. En face, les entreprises ont aussi de plus en plus les moyens de présenter des objectifs chiffrés et vérifiables en matière de RSE qui remplaceront les considérations générales en annexes des cahiers de spécifications techniques. Notre volonté est forte de les pousser à aller dans ce sens. »

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